Texte par Cadfael
Le 24 octobre 1945, la Charte des Nations Unies est entrée officiellement en vigueur, avec la ratification par 51 pays, y compris par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité. Notre pays comptait parmi les fondateurs et premiers signataires. Depuis 1948, le 24 octobre est célébré comme le jour des Nations Unies par les 193 états membres. Ce 75e anniversaire sera marqué entre autres, par une retransmission sur la page web de l’ONU d’un concert préenregistré à la Scala de Milan.
Maintenir la paix dans le monde
Les Nations Unies remplacent l’ancienne Société des Nations fondée en 1919 avec le traité de Versailles. Son but était maintenir la paix, mais paradoxalement elle n’interdisait pas la guerre. Elle constituait une sorte d’espace de dialogue pour diplomates. La Deuxième Guerre mondiale détruira toute sa crédibilité et à l’aube de la guerre froide, une structure de remplacement sera mise en œuvre avec l’espoir qu’un mécanisme multilatéral se montrerait apte à garantir une paix durable entre les nations. Ce sera l’ONU, plus grande avec plus de moyens et plus de pouvoirs.
Ses objectifs peuvent se résumer comme suit : maintenir la paix à travers le monde, développer des relations amicales entre les 193 pays signataires, faire respecter les Droits de l’Homme, travailler à la coopération internationale et « être un centre d’harmonisation des efforts des Nations dans des objectifs communs ».
Un budget sous menace
Le dernier budget ordinaire de l’organisation s’élève à 5,9 milliards de dollars. À cela s’ajoutent des contributions volontaires pour d’autres programmes tels que l’UNICEF, l’ONU-Femmes ou l’UNDP, le programme des Nations Unies pour le développement, qui en 2015 avoisinaient une trentaine de milliards de dollars par an. À ce montant il convient de rajouter les contributions obligatoires aux missions de paix et de maintien de l’ordre.
Il faut savoir qu’en ce moment 95 000 troupes, militaires, civils et policiers servent sur le terrain dans plus de 40 missions de maintien de l’ordre. Le Luxembourg participe de longue date à ces programmes de paix.
Mais comme le souligne un rapport gouvernemental français de septembre 2019 : « Un des principaux motifs de préoccupation est l’absence de prévisibilité des contributions volontaires et son incidence sur la stabilité des programmes exécutes ». Au regard de sa taille, notre pays est l’un des gros contributeurs au budget de l’ONU. Cette situation est d’autant plus grave lorsque l’on sait que le gouvernement de Trump fait tout pour ne plus financer l’ONU et particulièrement les volets à contributions volontaires, car les organismes récipiendaires ne lui « obéissent » pas.
Un bilatéralisme de mauvais augure
Au début de la pandémie, l’Organisation mondiale de la Santé aura tenté de jouer son rôle de supervision, la Chine la rejetant purement et simplement. La Chine pratique un multilatéralisme de façade tout en continuant tranquillement à tisser en sous-main sa toile appelée « route de la soie » par des accords bilatéraux lui donnant une influence jamais atteinte. En dehors des défis financiers, l’ONU se trouve confrontée à des changements de paradigme en matière de relations internationales. La tendance des États à prendre leurs distances par rapport au multilatéralisme pour se tourner vers des pratiques d’ententes bilatérales entre pays a été brutalement renforcée par le COVID, le cinquième cavalier de l’apocalypse comme le nommait le portugais Antonio Guterres, dans son discours du 22 septembre dernier, les 4 premiers étant d’après lui, le niveau très élevé́ de tensions géostratégiques, le défi climatique, la méfiance profonde et croissante entre états ainsi que la face sombre du monde digital.
Plus près de nous, on aura remarqué avec quelle rapidité le COVID aura désagrégé certains pans du multilatéralisme de l’Union européenne avec cet exemple symbolique du refus de livrer du matériel médical à l’Italie en réinstaurant des interdictions à l’exportation. On le voit de manière criante aujourd’hui avec la paralysie de Bruxelles face à des mesures harmonisées anti-Corvidé et à la résurgence des vieux mécanismes nationalistes en matière de fermeture des frontières sous prétextes sanitaires. Les Parlements nationaux n’ont guère leur mot à dire dans ce retour à des pratiques bilatérales pour tenter de résoudre un problème d’envergure mondiale.
Une structure sans équivalent dans le monde
Malgré ces déboires actuels et une histoire non exempte d’erreurs et de ratages, l’ONU, « le machin » comme l’appelait de Gaulle, n’a pas d’équivalent. L’ONU demeure plus que jamais un pilier d’aide au développement et de respect des droits de l’homme comme l’ont montré les remarques de Michelle Bachelet, la patronne du Haut-Commissariat des Droits de l’Homme, en ce qui concerne le camp de réfugiés de Lesbos où avec l’hiver les conditions vont empirer.
Plateforme de dialogue, l’ONU reste plus que jamais l’Alma Mater de l’assistance au développement et du respect des Droits de l’Homme. Notre pays participe depuis le début à cette difficile aventure et son influence n’y semble pas des moindres. Malgré les difficultés inhérentes aux jeux du multilatéralisme, celui-ci contribue à̀ rendre le monde un tout petit peu meilleur et peut-être plus sûr.