Marion Schouttenten, fondatrice et force créatrice derrière la marque de mode belge Orta, s’est récemment confiée lors d’une interview exclusive. À travers cette discussion, Marion partage non seulement les origines de la marque, une marque connue pour son engagement en faveur de la durabilité et de l’éthique dans la mode, mais aussi sa vision personnelle qui guide la marque.

Qu’est-ce qui vous a inspiré pour créer la marque Orta ?

Lorsque j’ai pensé Orta, ma première mission était d’ouvrir les yeux sur le monde, de regarder les autres. 

Une entreprise, c’est finalement comme un humain, on apprend de l’autre et on tente, à notre propre échelle, de faire au mieux. J’ai vite éprouvé l’envie de bouleverser les codes, de produire différemment. J’ai constaté que l’on a toujours produit avec les armes que le monde nous offrait. 

Il était donc était nécessaire de créer une marque éthique, mais une marque de plus  manquait d’intérêt. Il fallait que l’on prouve que produire bien était possible, surtout en Europe. Et par-dessus tout, j’ai créé ce que j’avais envie de porter. 

Pour mettre en lumière ce savoir-faire européen, notre communauté a été la pierre la plus précieuse. C’est elle qui nous a donné les moyens d’avancer ; sans boutique physique (c’est un choix puisque nous sommes historiquement une DNVB : Digital Native Vertical Brand), comment rencontrer notre cliente sans les réseaux sociaux ? Notre succès s’est bâti grâce à cette porte sur l’extérieur et l’interaction avec les femmes Orta. En tant que nouvelle marque, nous devons contribuer à l’évolution des mentalités et du mieux consommer, nous appliquons  la transparence partout, tant dans la confection que dans l’organisation ; nous ouvrons les portes en grand à travers nos réseaux et montrons tout. 

Quels sont les principes éthiques et durables sur lesquels reposent la marque Orta ?

Les principes éthiques ne sont en soit pas une raison d’être mais la conséquence d’une culture Européenne.

La formidable accroissement de richesses Européennes de ces 50 dernières années ont obligé les industries produisant sur notre sol à adhérer aux standards RSE les plus stricts au monde que ce soit au bilan carbone de notre mix énergétique, à la pollution de nos sols et de nos eaux ou à l’efficacité énergétique de nos industries. De facto, lorsque notre ambition est de produire le maximum d’étapes de la chaîne de valeurs au niveau Européen, nous bénéficions de la meilleure note RSE possible relativement au reste du monde.

La production Européenne étant plus onéreuse que dans le reste du monde, elle a du s’adapter en devenant plus créative et plus qualitative.

Comment choisir les matériaux et les fournisseurs pour vos collections ?

Nous explorons toutes les pistes issues de l’UE parce que nous savons qu’il faut privilégier un savoir local (local en textile c’est 3500 km) qui sera important dans un monde ou la globalisation va de facto devenir de plus en plus compliquée. D’autre part, choisir des partenaires en UE, c’est privilégier toute l’industrie Européenne tant les usines de textile en Europe achètent avant tout des machines Européennes.

Pour ce qui est des matériaux, il y a un vrai dilemme ces temps-ci. Nous avons toujours privilégié les matières naturelle et au début il était possible de remplir l’équation matière naturelle à prix abordable. Cette équation n’est malheureusement plus possible et Orta va devoir s’orienter sur le côté premium pour continuer à produire avec des matières naturelles.

Quels sont les défis auxquels vous avez été confronté en tant que créatrice de mode responsable ?

Pour résumer le tout, je dirais les prix de l’énergie. 

Le prix de l’énergie a tellement monté ces dernières années que le paradigme a changé. Nous changeons ainsi de clientèle petit à petit par nécessité de conserver les valeurs d’origine de la marque et une telle transition aussi brusque est toujours difficile à gérer. Le deuxième défi que je noterai est la barrière d’entrée. Il a été très difficile pour Orta à ses débuts de convaincre les fournisseurs tant les volumes d’entrée dans l’industrie textile peuvent être élevés.

Comment se différencie-t-elle des autres marques de mode sur le marché ?

Je dirai par la raison d’être d’Orta: préserver le patrimoine culturel Européen en générant de la création de richesses en Europe et par notre communauté qui nous donne les moyens d’avancer chaque jour.

Quels sont vos projets futurs pour la marque Orta

Sans aller trop dans le détail, le projet d’Orta est de devenir plus premium et de s’internationaliser en exportant nos valeurs.

Comment intégrer-vous les tendances actuelles de la mode dans vos collections tout en restant fidèle à vos valeurs éthiques ?

Pour nous l’un n’empêche pas l’autre, je crois qu’il faut prendre du recul sur l’industrie textile globale pour comparer les modèles. Il s’agit clairement un modèle éthique qui est une vraie alternative à la fast fashion et même au secteur du luxe tant nous produisons dans les mêmes usines avec souvent les mêmes matériaux.

Sinon la marque ne cherche pas à fabriquer des vêtements tout droit sortis de la fashion week et qui sont la plupart du temps importables. Orta veut habiller toutes les femmes tous les jours.

Quel impact social et environnemental souhaitez-vous avoir en tant que marque de mode responsable ?

Encore une fois je privilégie l’objectif de création de richesse en Europe. Seul la création de richesses permettra le meilleur RSE possible en UE, je crois que le Luxembourg et la Suisse sont de bon exemples de RSE avec très peu de contestation du public.

Comment travailler-vous avec les artisans et les usines familiales pour assurer une éthique de production ?

Je pense que le meilleur moyen est de se déplacer sur place aussi souvent que possible, le deuxième élément le plus important à analyser est de se questionner sur le niveau de corruption du pays dans lequel vous produisez. Il existe un indice tout à fait crédible sur le world justice project. Assez rapidement en faisant ces deux premiers test, vous pouvez conclure que le système fonctionne relativement bien comparé à d’autres ayant un très mauvais niveau de corruption.

Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent soutenir la mode éthique et responsable ?

Commencez local, vous démarrez une aventure aussi difficile que passionnante mais les barrières d’entrée seront votre premier obstacle. Ensuite entourez-vous de personnes complémentaires le plus vite possible. Le secret de la réussite passe par la complémentarité des talents. soyez aussi patients, aller trop vite fait qu’il devient difficile de maintenir la qualité d’un modèle à la croissance. Enfin préservez-vous, être entrepreneur est vraiment physique et il faut être stratège sur l’endurance plutôt que sur le sprint :).

Inscrivez-vous à notre newsletter pour découvrir tous les jeudis, des actus locales, des nouvelles tendances mode, des infos culture, business… C’est en un clic avec ce lien !