Texte : Mathieu Rosan

Alors que le gouvernement a amorcé sa « phase 1 » du déconfinement et que la première vague de l’épidémie semble sous contrôle, le retour à la normale semble pourtant encore très loin et il faudra désormais faire avec les problématiques que vont engendrer la fin du confinement et affronter les différentes vagues épidémiques qui devraient arriver dans les mois à venir.  

En fin de semaine dernière, sur une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, Paulette Lenert, notre ministre de la Santé, déclaré que « l’épidémie était plus ou moins sous contrôle ». Après une première vague « assez modérée » selon ses propos, le plus dur reste peut-être à venir avec la fin progressive du déconfinement et le spectre d’autres vagues épidémiques qu’il faudra gérer avec la même attention que la première.

Avec en moyenne 24 nouveaux cas par jour au Grand-Duché la semaine dernière, la courbe du nombre de nouvelles infections depuis la fin du mois de mars est doucement en train de s’inverser et le pic semble désormais derrière nous. Ainsi, il faut désormais penser à la prochaine phase de la gestion de ce virus. Pour le Dr Jean-Claude Schmit, directeur de la Santé, « l’accalmie au niveau de l’occupation des lits rend la situation gérable. La capacité est telle que nous pouvons entrer dans la prochaine phase » ajoutant qu’il était désormais possible « d’établir une série d’éléments qui sont importants pour le déconfinement ».

Une distanciation sociale nécessaire jusqu’en 2022

Ainsi, ce lundi 20 avril, le gouvernement a lancé sa « phase 1 » avec la reprise des chantiers et la réouverture des centres de recyclage municipaux, des magasins de bricolage, des paysagistes et des jardineries. En parallèle, il a mis en place des premières mesures comme l’obligation de porter un masque dans les lieux où une distance de sécurité de deux mètres ne peut être respectée, tels que les transports en commun. La deuxième phase aura lieu le 4 mai avec le retour dans les lycées des élèves de 1ere et de 3e et une troisième phase prévue le 11 mai avec le retour des autres classes de lycée. Les cours reprendront une semaine plus tard pour les élèves du secondaire et le 25 mai dans le primaire. Les classes seront divisées en deux, chaque moitié alternant entre une semaine à l’école et une semaine de travail à la maison.

Si ces différentes phases s’apparentent au début d’un retour à la normal, plusieurs chercheurs de l’université d’Harvard ont publié une étude dans laquelle on apprend qu’il faudra plusieurs périodes de distanciation sociale jusqu’en 2022 pour empêcher que le nouveau coronavirus n’engorge les hôpitaux de malades. « En l’absence de traitements, des périodes intermittentes de distanciation sociale seront sans doute nécessaires » selon l’un de ses auteurs, Stephen Kissler. La durée et le degré de confinement pourront être réduits quand des traitements efficaces ou un vaccin auront été découverts. D’ici là, il faudra osciller entre confinement et ouverture afin de prévenir une nouvelle vague et permettre aux systèmes de santé de gonfler leurs services de réanimation.

Vers la construction d’une immunité collective ?

Marc Lipsitch, professeur d’épidémiologie, explique qu’en acceptant des périodes de contaminations plus élevées pendant les déconfinements épisodiques, le virus va inévitablement contaminer une proportion croissante de la population (idéalement, les plus jeunes et moins vulnérables). Cela rendra plus de gens malades, mais présentera l’avantage de construire progressivement l’immunité collective de la population, c’est-à-dire le niveau à partir duquel il n’y aura plus assez de gens susceptibles d’être contaminés pour que le virus continue à circuler. Trop de confinement, à l’inverse, empêcherait de bâtir cette immunité collective, ont simulé les chercheurs, qui en concluent que l’approche la plus efficace est le maintien intermittent de mesures de distanciation sociale (confinement, fermeture des écoles et entreprises…).

On ignore encore si les gens contaminés développeront une immunité courte ou longue. Pour des virus cousins, comme ceux du rhume, l’immunité s’érode au bout d’un an. Pour le Sras, elle est longue. Une chose est certaine, selon les auteurs de l’étude : le nouveau coronavirus ne va pas disparaître du jour au lendemain. Il est improbable, selon eux, que l’immunité soit assez forte et assez durable pour qu’il disparaisse à la fin de la première vague que nous traversons en ce moment (contrairement au Sras de 2002-2003).

 

À LIRE AUSSI