Texte Marie Santer
Paru chez Grasset à la rentrée 2019, le roman autobiographie Le consentement, de Vanessa Springora vient d’être édité au format poche. L’occasion de revenir sur ce sujet de société éminemment important et nécessaire. Le roman nous entraine en plein Saint-Germain-des-Près, là où se croisent l’élite littéraire des années 70 et une certaine jeunesse libérée. Vanessa Springora prête ainsi sa plume à V., une adolescente de 14 ans, sous l’emprise d’un écrivain célèbre en âge d’être son père.
« Grace à lui, j’existe enfin »
Petite fille curieuse et solitaire, V. grandit dans le Paris littéraire des années 70, élevée par un père un rien loubard et une mère évoluant dans l’édition, qui bientôt vont se séparer. C’est avec ce manque que se construit la petite V. et comme de nombreuses adolescentes, elle se trouve repoussante et s’isole peu à peu. Inquiète par cette solitude constante, sa mère l’emmène de diners mondains en diners mondains.
Là, elle rencontre G., un grand écrivain parisien connu pour son charme. Ils se décroisent et discutent au point que V. tombe peu à peu amoureuse de cet homme de 50 ans, elle qui en a seulement 13.
« La présence de cet homme est cosmique »
On suit l’évolution de V., qui ne comprend pas comment un homme comme G. peut être attiré par elle, une petite collégienne sans intérêt. Pourtant, à travers ce regard, cette attention qui lui porte, elle se sent belle et se laisse aisément envouter et séduire par l’écrivain qui communique par lettres.
Grâce à ce roman, Vanessa Springora contextualise sa propre histoire. Nous sommes les années 70, quelques années seulement après la libération sexuelle de mai 68. On scande partout “Il est interdit d’interdire”, un slogan que l’on appose également à la sexualité. Pour toute une génération de fervents défenseurs de la liberté, rien de toxique ni de malsain dans cette relation entre une mineure et un homme de 36 ans son ainé.
« Elle était consentante, ça va de soi »
La question de consentement ne se pose a priori pas pour V. G. ne la force en effet à rien. Pourtant, qu’en est-il du libre arbitre ? Du choix ? De la liberté de choix lorsque l’on a 14 ans et que l’on se retrouve face à un homme de 50 ? Où se place la dépendance affective et émotionnelle ? Et où intervient l’amour ?
Ce roman met en lumière toute la complexité de la notion de consentement. Elle se laisse faire, mais le veut-elle ? N’a-t-elle pas simplement peur de cet homme qui se transforme peu à peu en son bourreau ? Un roman nécessaire à l’heure où le sujet fait encore débat, et où l’on s’interroge encore pour savoir si un enfant peut être consentant à partir du moment il ne dit pas non. Un roman pour mieux comprendre l’emprise, les relations toxiques, comme une caisse de résonance de l’actualité.
