C’est en 1987 que Véronique de la Bachelerie fait ses premiers pas à la Société Générale. 30 ans plus tard, elle en dirige la filiale luxembourgeoise, occupant la fonction d’Administrateur déléguée.
Déterminée et ambitieuse, la CEO – qui a toujours mis un point d’honneur à concilier vie privée et vie professionnelle – se bat aujourd’hui pour faire céder le plafond de verre. Elle nous livre quelques clés de sa réussite.
S’il n’y avait qu’une seule chose à retenir de votre parcours, ce serait…
J’ai eu la chance de débuter ma carrière en travaillant dans un cabinet d’audit. On ne le valorise pas assez, mais cela représente un réel avantage. Cela m’a en effet permis d’être promue très rapidement et d’accéder ainsi, bien plus rapidement que dans une société classique, à un poste à responsabilités. En outre, cela favorise l’expérience du contact avec les dirigeants. C’est vraiment une formidable opportunité, surtout quand on est une femme, car il est fondamental de savoir booster sa carrière dès les premières années. C’est sans aucun doute l’un des meilleurs conseils que je puisse vous donner.
Travailler dans le secteur financier a toujours été votre souhait ?
Absolument. Depuis que je suis sortie de mon école de commerce, j’aspirais à devenir directrice financière. C’est primordial d’avoir un projet, une vision à long terme !
De quelles compétences un bon manager doit-il faire preuve ?
Elles sont au nombre de trois : donner du sens aux membres de votre équipe, encourager les personnes, et, surtout, apporter un feedback positif. Il faut revenir sur la culture française qui pousse à ne mettre en lumière que ce qui ne va pas. C’est source de désengagement.
Avez-vous fait des choix de carrière que vous avez regrettés par la suite ?
Sans que ce soit un véritable regret, car j’ai tout de même relevé beaucoup de challenges durant cette période, rester 15 ans dans le même service est une erreur. On vous colle alors une étiquette, dont il n’est pas facile de se défaire, surtout sur une fonction support.
Quelles sont vos forces ?
Je pense être profondément humaniste. Je fais confiance et j’ai foi en les personnes avec lesquelles je travaille et ai plutôt tendance à voir leurs forces que leurs faiblesses. Cela me permet de combiner les talents au sein d’une équipe.
Vous avez dit qu’une carrière se construisait en couple. Comment parvenez-vous à jongler entre vie personnelle et vie professionnelle ?
Réussir à créer – et à maintenir – un équilibre. Dans une vie, nos priorités évoluent constamment, on ne peut aller contre cela. Avec mes enfants, j’ai fait en sorte de privilégier la qualité à la quantité. Il n’est pas si important d’être là tout le temps, mais plutôt aux moments importants. Et quand on fait une promesse, il faut la tenir. Si vous vous engagez à être présente au spectacle de fin d’année de l’école, soyez-y. Enfin, contrairement aux idées reçues, il est plus important d’être à leur écoute pendant leur adolescence que lorsqu’ils sont tout petits. Un adolescent qui a commencé à dériver doit être accompagné de suite, sinon les conséquences peuvent être critiques. Et je parle en connaissance de cause !
Les femmes ont la fâcheuse tendance de vouloir être parfaite en tout, ce qui n’aide pas toujours : il est fondamental de savoir déléguer, et ainsi, d’avoir des personnes de confiance, sur lesquelles nous pouvons nous reposer. Une carrière, ça se gère, avec des temps forts et d’autres moins. Avec mon mari, c’est ce que nous avons fait : quand j’ai eu besoin de m’investir davantage, il a fait en sorte d’être plus disponible pour nos enfants. Et vice versa.
Quel conseil donneriez-vous aux femmes qui souhaitent accéder à de hautes fonctions ?
Boostez votre carrière dès les premières années, frappez fort et vite ! Ayez un objectif à long terme, une vision. Constituez-vous des réseaux. Et n’hésitez pas à les faire fonctionner. J’ai pu gravir les échelons grâce aux sponsors que j’ai rencontrés et qui ont appuyé ma candidature. Et osez : être une femme ne doit pas être un frein, ce qui prime, c’est les talents ! Et nous en avons !
Mais le plafond de verre est pourtant une réalité…
En effet. Vous savez, lorsque je fréquentais les bancs de mon école de commerce, nous étions 50% de femmes. À l’heure actuelle, il n’y a en aucun cas la même proportion de femmes-cadres. Où sont-elles donc passées ?
Faire complètement sauter ce plafond de verre sera un processus long et délicat, car c’est toute notre société – qui repose sur un modèle patriarcal – qui doit changer. C’est la condition sine qua non. Cela nécessitera beaucoup de travail, mais j’y crois. C’est d’ailleurs pour cela que je suis à l’initiative de Financi’Elles -, dont l’objectif est de promouvoir la mixité dans le secteur financier. Pour ce faire, j’ai été pendant 10 ans présidente de l’association SG au féminin et nous travaillons, à l’échelle de l’ensemble du groupe Société Générale dans le monde, sur des problématiques différentes – elles diffèrent selon les pays. Mais nous tendons vers un seul but : l’égalité.