Hormis les facteurs génétiques et comportementaux comme le tabac ou l’alcool, comment pouvons-nous prévenir le cancer? A quelques jours de la journée mondiale du cancer, le 4 février, Marie-Christine Boutron-Ruault, directrice de recherche Inserm à l’Institut Gustave-Roussy, et vice-présidente du Comité d’experts spécialisé Nutrition humaine à l’Anses, nous livre les dernières connaissances en termes de nutrition et d’environnement.

Quel lien peut-on établir entre cancer et alimentation aujourd’hui?

Depuis longtemps, on sait que le mode de vie, et notamment l’alimentation, jouent sur le risque de cancer. Lorsque des Japonais émigrent à Hawaï et se mettent à consommer des produits transformés, ils augmentent d’un tiers leur risque de cancer. On peut affirmer que les produits bruts non raffinés, tout comme les fibres et les céréales complètes diminuent le risque de cancer de 30 à 35%, et notamment les cancers digestifs du colon, du pancréas et de l’estomac. Les graisses et notamment le surpoids sont un facteur de risque de presque tous les cancers (foie et pancréas surtout), car elles jouent sur les hormones. Par exemple, après la ménopause, les femmes qui prennent du poids ont un risque de cancer accru.

Quels aliments ont une incidence directe sur le risque de cancer? 

On sait aujourd’hui que la charcuterie et la viande rouge augmentent le risque de cancer de l’intestin et de l’estomac, comme l’indique les derniers rapports de l’OMS. Ils doivent rester des aliments plaisir à consommer à hauteur de 25g par jour. On sait par ailleurs qu’associer des anti-oxydants, comme les fruits et les légumes diminuent l’effet aggravant.

Que sait-on aujourd’hui de l’impact de l’environnement sur les cancers? 

Nous ne disposons pour le moment d’aucune estimation réelle, exception faite des personnes directement exposées aux pesticides ou substances toxiques, à l’instar des agriculteurs. En revanche, on peut affirmer que ces produits représentent un facteur de risque, difficilement mesurable. Attention à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain pour autant, à savoir ne plus manger de fruits ou légumes sous prétexte de leur nocivité potentielle. Réduire le risque consiste à choisir des produits de saison et de qualité. Des études biologiques sont en cours en France et à l’étranger pour mesurer ces risques.

Les compléments alimentaires peuvent-ils nous aider à prévenir le cancer?

Mieux vaut chercher les vitamines dans l’alimentation que dans les compléments alimentaires qui peuvent avoir une action contre-productive, voire délétère en termes de cancer. Nous avons montré qu’il y avait un sur-risque de cancer du sein de l’ordre de 50 à 60% chez les femmes qui prenait 500mg de vitamine C tous les jours, en plus d’une alimentation qui en contenait suffisamment. Même constat pour la vitamine D. On a tendance à considérer la carence quand le taux affiche 20ng dans le sang. Entre 20 et 30ng, le taux doit être considéré comme normal. Il n’y a aucune raison de se supplémenter. Pour les personnes en surpoids ou obèses ou qui présentent un IMC inférieur à 25, je préconise des gouttes quotidiennes. Pour l’heure, les cancers digestifs ont été associés à une carence en vitamine D.