Depuis quelque temps, on peut voir sur les réseaux sociaux des influenceurs faire la promotion de “retraites silencieuses”. Aux antipodes du luxe et de l’agitation de Dubaï, ces séjours sont loin d’être anodins. La parole est complètement interdite. L’objectif ? Se concentrer sur soi-même, méditer, réfléchir et surtout, se déconnecter de tout.
Se taire pour retrouver la paix et la tranquillité. C’est la règle d’or de ces “retraites silencieuses”, ces séjours effectués seuls dans des lieux calmes, voire isolés, pendant quelques jours ou plusieurs semaines. Au cours de ces retraites mutiques, on abandonne les téléphones, les réseaux sociaux, et le PC portable du travail, afin de se recentrer sur soi-même, se rééquilibrer et tenter de redonner du sens à sa vie.
Une influenceuse française du nom de Solenefeig, suivie par plus de 420 000 abonnés, a partagé son expérience La vidéo qui raconte sa retraite silencieuse à Bali a été visionnée plus de 38 000 fois. Dans les commentaires : “Incroyable, un rêve pour moi, je le ferai un jour”, “donne tellement envie”. Bien loin des chambres luxueuses, le décor des retraites est presque rustique et les personnes qui y participent viennent à la recherche de la guérison intérieure. Surtout depuis le Covid-19.
“Le confinement a permis l’essor du développement personnel, ce qui a incité les gens à se recentrer sur eux-mêmes”, explique Jeanne Lehmann, fondatrice de “Silence”, qui a organisé plusieurs retraites depuis sa création en 2019. Depuis, les retraites silencieuses sont devenues le séjour phare du bien-être, et sont assez relayées par les réseaux sociaux. Une visibilité efficace qui permet aux compagnies de retraites d’attirer des curieux. Dans le cas du compte Instagram de la retraite Silence, qui réunit presque 13 000 abonnés, des témoignages de personnes qui ont participé au séjour sont relayés ainsi que des aperçus des activités. Pour Guillaume Charroin, fondateur de la retraite Clairière et Canopée, cette expérience est bénéfique, tout particulièrement pour des personnes ayant vécu des événements tragiques, ou qui viennent lutter contre des addictions. “En organisant ces retraites, j’espère pouvoir transformer le quotidien de personnes surmenées par leur quotidien qui n’arrivent plus à prendre soin d’elles”, ajoute Jeanne Lehmann, de Silence.
Faire la paix aussi avec son corps
Les retraites silencieuses trouvent leur origine dans une technique bouddhiste ancestrale connue sous le nom de Vipassana. Signifiant “voir les choses telles qu’elles sont réellement”, Vipassana repose sur la transformation de soi par l’auto-observation.
C’est en reprenant ce concept, que les retraites silencieuses sont nées. Guillaume Charroin, fondateur de la compagnie Clairière et Canopée, basée en France, propose depuis quelques années des séjours de jeûne et de silence en partenariat avec l’Organisme Silence : “Nos séjours permettent de se ‘détoxifier’ et de mettre ‘au repos’ la sphère psycho-émotionnelle”. Au programme : marches à l’air libre, séances de méditation, yoga, et tout cela, sans téléphone. Toutefois, le silence n’est pas tout de suite imposé. “Le silence est installé progressivement dans le quotidien des participants. Les deux derniers jours, un silence complet est demandé aux participants. “A l’heure où notre mental est saturé d’informations, et notre corps épuisé par les rouages du quotidien, ce moment de déconnexion totale pourrait apporter des bénéfices à notre santé”.
Ces séjours ont lieu dans différents endroits, comme des centres de méditation, des monastères, des ashrams, des centres de yoga ou des centres de développement personnel. Ces retraites peuvent être guidées par des enseignants ou des instructeurs spirituels, ou être auto-dirigées, où les participants ont le choix de suivre leur propre rythme et leur propre pratique. Dans le cas des retraites de Clairière et Canopée qui allient jeûne et silence, les participants sont invités à prendre des jus de fruits et des soupes biologiques au moins trois fois par jour, s’inspirant de la méthode de jeûne de Buchinger. “Tous ces liquides possèdent des vertus antioxydantes, revitalisantes, nettoyantes”, précise Guillaume Charroin. “Le jeûne va permettre de créer un vide intérieur pour nous aider à nous reconnecter à nos émotions. La nourriture sert souvent à compenser nos contrariétés. Ici, nous donnons l’occasion au corps de rééquilibrer son alimentation, de se nettoyer complètement. Tout le corps s’investit”, poursuit-il.
Entre lâcher prise et introspection
Louise, comme beaucoup d’autres personnes, a vécu un événement tragique. “J’ai perdu un proche, ce qui m’a énormément affectée”. Entre cette perte et son métier très prenant, sa santé mentale s’est retrouvée particulièrement affectée. “J’avais besoin de lâcher prise et de faire mon deuil loin de la pression, du travail”. C’est en tombant sur le compte Instagram de Silence que Louise découvre les retraites silencieuses. Elle se décide par la suite à partir avec son compagnon pour la retraite organisée par Silence et Clairière et Canopée. “J’avais très peur de l’idée du silence total, d’avoir à nouveau des idées noires, mais une fois arrivée, tout le contraire s’est produit”. Durant ces six jours dans la Drôme, Louise a été totalement coupée du monde extérieur. Pas de téléphone, ni de réseaux sociaux. Les journées étaient rythmées par des randonnées, de la lecture, et des séances de massage avec des horaires fixes.
“Pendant les randonnées silencieuses, on s’attardait sur nos autres sens, notamment sur l’observation. On se reconnecte complètement à la nature. On est si sollicités au quotidien. C’était un moment hors du temps où je me donnais le droit d’être indisponible”, explique Louise. Les premiers jours, comme n’importe qui, Louise a eu d’abord eu du mal à se défaire de ses habitudes de vie. “Mais au fur et à mesure du jeûne, ma faim disparaissait, j’apprenais enfin à écouter mon corps”, ajoute-t-elle. Au terme du séjour, Louise n’a pas seulement profité d’une retraite, mais d’une expérience pleine de clairvoyance et d’introspection, qu’elle souhaiterait refaire à nouveau. “Je pense que le plus beau cadeau qu’on peut se faire, c’est de se redonner du temps”.