Voilà qu’arrive dans nos salles obscures le dernier long-métrage des frères Coen, une satire à mi-chemin entre la comédie et l’hommage. Avec un casting de choc, cette nouvelle œuvre sobrement baptisé Ave, César!, se révèle savamment orchestrée et envoûtant de la première à la dernière image.

Hollywood se raconte

Après le western True Grit et la comédie-dramatique Inside Llewyn Davis, les voilà qui nous plongent dans les années 40-50, une époque où Hollywood était encore une fantastique machine à rêve. Eddie Mannix, «fixeur» pour Capitole, un des plus célèbres studios de cinéma américain de l’époque, est chargé de régler tous les problèmes de ses employeurs, mais aussi ceux des acteurs, quels qu’ils soient. Seulement voilà, occupé à régler les égo-trip des uns et des autres, on enlève la plus grosse star du Studio, Baird Whitlok. On retrouve Josh Brolin dans le rôle principal, loin des habituels héros-victimes si caractéristique de la filmographie des Coen, puisqu’il incarne un personnage fort et débrouillard, emporté malgré lui dans un tourbillon d’évènements, aux côtés de George Clooney, Channing Tatum et Scarlet Johansson. Le quotidien d’une major du cinéma n’aura jamais été aussi plaisant à regarder, avec cette virtuosité dans le maniement de la caméra et dans l’écriture de la narration, parfois déconcertante mais toujours dans le bon sens du terme. Les frères Coen ne font rien comme les autres et nous n’en attendons pas moins.

Un amour cinglant

Avec Ave, César!, les frères Coen offrent à leur tour à la postérité leur film consacré au 7è art, sans pour autant verser dans la nostalgie d’un âge d’or révolu. Nous avons plutôt devant les yeux un film choral dans lequel les intrigues et les genres s’entrecroisent à merveille. Les péripéties inventées par les frères Coen nous font passer à travers différents genres cinématographiques, du peplum et la comédie musicale, en passant par le western ou le film noir. Nous pénétrons dans une suite de références plaisantes et brillantes. Les réalisateurs évitent de s’engouffrer dans l’hommage pur et simple, n’hésitant pas à se moquer aussi bien de leur héritage que de leur propre génération, pour un rendu résolument moderne, qui parlera à tous. Les adeptes du cinéma le plus expérimental des frères Coen, avec Fargo et A Serious Man en tête, ne seront pas charmer outre mesure par ce long-métrage, qui est bien plus lisse. Cependant, le cinéma se raconte avec panache et nous quittons la salle l’esprit retourné par 1h45 de course folle à travers son histoire et ses coulisses. S’il n’est peut-être pas au même rang que certaines œuvres iconiques, Ave, César! reste une magnifique réussite qui mérite le coup d’œil.

Etienne Poiarez