Texte par Cadfael

Le 22 mars dernier les hôpitaux de Paris ont été la cible d’une attaque informatique de grande envergure. En Tchéquie, des systèmes de communication et d’information cruciaux pour les infrastructures médicales avaient également été la cible de cyberattaques à grande échelle, des laboratoires de recherche médicale en matière de coronavirus avaient été touchés.

Dans un rapport de mars dernier, Europol constate que depuis le début de la pandémie, les attaques de ce type avaient atteint une envergure jamais vue. Dans les milieux de l’Otan, elles sont appelées « cyber activités déstabilisantes et malveillantes » et étaient particulièrement fréquentes en période de COVID.

Une mise au point européenne face à la Chine

Le 22 juin, les Présidents du Conseil Européen et de la Commission Européenne ont interpellé la Chine au sujet d’attaques informatiques à répétition sur des cibles situées au sein de l’Union Européenne. Durant une visio-conférence de plus de six heures et à laquelle ont participé à tour de rôle le Premier ministre et le Président chinois, les Européens ont exprimé leur mécontentement au sujet de l’attitude de la Chine en matière de désinformation Covid et de cyberattaques.

Comme le citait France 24, le 23 juin 2020 : « Cette rencontre virtuelle avait pour but de préparer une réunion extraordinaire entre le Président chinois et les dirigeants des 27 alors que les deux parties espèrent signer cette année un accord sur la protection des investissements. » /…/ « Les Chinois sont pour leur part, préoccupés par la nouvelle législation européenne sur les investissements étrangers et la prise de distance de l’UE à leur égard. » Aucun communiqué commun final n’a été rédigé.

Après la vidéoconfénce la Présidente de la Commission a été plus précise : selon Politico du même jour, elle aurait déclaré que les services de Bruxelles ont analysé les attaques. « Nous connaissons l’origine de ces attaques. Nous avons clairement souligné que cela ne pouvait être toléré ». La Chine n’est pas le seul pays à être pointé du doigt : la Russie a également une belle tradition en la matière. Les pays en question, évidemment, nient tout.

Un programme de lutte européen

Au vu des niveaux de malveillance atteints, Bruxelles ne peut plus faire le dos rond même si les intérêts économiques risquent d’en pâtir. En date du 10 juin dernier, les institutions européennes réunies, c’est à dire le Parlement, le Conseil, la Commission pour ne citer que les principales, ont édité un document intitulé : « Lutter contre la désinformation concernant la COVID-19 – Démêler le vrai du faux ». En introduction, le document cite : « La pandémie de COVID-19 s’est accompagnée d’une «infodémie» sans précédent. Une avalanche d’informations relatives au virus, souvent fausses ou inexactes et se propageant rapidement par l’intermédiaire des médias sociaux » afin de « servir de prétexte pour porter atteinte aux libertés et aux droits fondamentaux ou de faire l’objet d’abus à des fins politiques au sein de l’Union européenne et en dehors de celle-ci ».

Des exemples et des solutions ?

Et le document de citer en exemple : « Les informations qui circulent où figurent de dangereux canulars et des informations erronées sur les soins de santé, avec de fausses allégations (comme « Il ne sert à rien de se laver les mains » ou « Le coronavirus n’est dangereux que pour les personnes âgées »). » Auxquelles s’ajoutent la diffusion de théories conspirationnistes, des discours haineux illicites, des fraudes à la consommation ainsi diverses formes de cybercriminalité et des opérations d’influence lancées par « des acteurs étrangers et certains pays tiers, en particulier la Russie et la Chine. ». Le texte souligne que la coopération entre Etats membres est essentielle pour combattre cet état de fait. Parmi les solutions préconisées ; des campagnes d’information et de sensibilisation et une plus grande transparence des plateformes en ligne. 

Bruxelles mise sur un « observatoire européen des médias numériques (EDMO), qui vient d’être lancé et qui vise à soutenir la création d’une communauté transfrontière et pluridisciplinaire de vérificateurs de faits indépendants et de chercheurs universitaires, qui collaboreront avec les parties prenantes concernées pour détecter, analyser et mettre en lumière les menaces potentielles de désinformation, y compris dans le domaine de la COVID-19. « Pour accompagner ces efforts, la Commission continuera de cofinancer des projets indépendants dans les domaines du journalisme, de la liberté et du pluralisme des médias. Elle facilitera l’accès au financement et aux possibilités de financement pour le secteur des médias ». Une usine à gaz qui mettra probablement du temps à fonctionner et qui risque vraisemblablement d’être très difficile d’accès pour les petites entreprises. (https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/communication-tackling-covid-19-disinformation-getting- facts-right_fr.pdf)

ICE ou le Collège du Renseignement en Europe

Plus efficace et moins tapageur, la mise en place d’une initiative intitulée « ICE » en anglais ou « Collège du renseignement en Europe » en français, dont l’initiative remonte à une idée du président Macron émise en 2017. 

C’est une institution européenne mais non communautaire qui constitue une plateforme d’échange de best practice, de dialogue et de formation entre les communautés du renseignement des 25 pays participants, en lien avec les universités et les décideurs économiques et politiques. 

Malgré le Brexit, le Royaume-Uni en est membre. Parmi les 25 pays signataires du document fondateur le 26 février 2020 à Zagreb, le Grand –Duché était absent. Seraient-ce les séquelles de la période Juncker ? Même la Suisse compte participer. La réponse est chez le Premier ministre, patron politique du SREL, M. Bettel ne plaide-t-il pas pour une Europe forte ? (https://www.intelligence-college-europe.org). La volonté de notre Premier ministre est de solidariser l’Europe. Au cours de l’émission de TV5-Monde du 27 juin dernier dédié au Luxembourg, Xavier Bettel a plaidé pour une « stratégie d’industrie pharmaceutique européenne » et vise « une indépendance par rapport aux autres continents. /…/ Pour l’instant ce sont de petits pas »/ …/« Après le vaccin, l’Europe doit prendre les commandes pour protéger les plus vulnérables. La justice est le fondement de la société et le fondement de l’Europe, une justice qui ne fonctionne plus n’a pas sa place dans l’Europe. a-t-il souligné.

Si vis pacem, para bellum.

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