Quiet quitting, conscious quitting, ou encore ressentéisme… On ne compte plus les termes employés ces dernières années pour désigner la souffrance des salariés, et parfois même leur désengagement professionnel. Chose qui serait liée à une accumulation de situations frustrantes, à en croire une nouvelle étude, et qui toucherait davantage les jeunes, moins tolérants que leurs aînés face aux difficultés rencontrées quotidiennement dans le cadre du travail.

La crise sanitaire a rebattu les cartes du marché du travail, que ce soit en termes d’organisation avec la démocratisation du télétravail, ou de quête de sens. Nombreux sont les salariés qui ont entamé une réflexion profonde quant au rapport qu’ils entretiennent avec leur environnement professionnel ou, pour les plus jeunes, ce qu’ils en attendent, au point de dénoncer doucement mais sûrement les difficultés qu’ils rencontrent au quotidien. Un phénomène qui a vu émerger de nouveaux termes, à l’instar du quiet quitting, qui consiste à faire le strict minimum pour préserver sa santé mentale, du rage applying, qui vise à postuler massivement à des offres d’emploi suite à une déception professionnelle, ou encore du ‘ressentéisme’, un néologisme traduisant le fait de ne pas pouvoir quitter un travail que l’on déteste, faute de mieux.

Autant de mots – ou de maux – destinés à mettre en lumière des conditions de travail difficiles, l’absence de revalorisation salariale, ou un management trop strict, mais aussi à inciter les dirigeants à repenser leurs méthodes. L’objectif ? Stopper le phénomène de ‘grande démission’, né à l’issue de la crise sanitaire. C’est justement l’objet d’une nouvelle étude menée par OpinionWay pour Indeed, qui s’est penchée sur les principales raisons qui poussent aujourd’hui les salariés à quitter leur travail. Il en ressort que les conditions de travail, qu’elles touchent à l’organisation ou à la charge mentale, sont mises en cause dans la plupart des cas, et que les plus jeunes générations sont moins tolérantes vis-à-vis de situations qu’elles jugent frustrantes ou désagréables au quotidien.

La confiance, un réel enjeu

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la revalorisation salariale n’est pas le principal désagrément mentionné par les sondés, et encore moins celui qui pourrait leur donner envie de quitter l’entreprise dans laquelle ils travaillent. Près de six salariés sur dix (57%), et près des deux tiers des 18-30 ans (64%), évoquent en premier lieu le manque de confiance et d’estime de leur manager, avant de parler des heures supplémentaires non payées (56% de l’ensemble des salariés, et 58% des 18-30 ans). Mais une part importante du panel (54%) déclare également que le refus du télétravail, si leur poste le permet, constitue une raison valable de vouloir démissionner, tout comme la sensation d’être livré à soi-même, autrement dit d’être peu ou mal managé (44% de l’ensemble des répondants, et 51% des 18-30 ans).

“A situations égales, les pourcentages indiquant l’envie de démissionner sont systématiquement plus élevés chez les 18-30 ans que dans l’ensemble du panel, ce qui marque une moindre tolérance aux situations perçues comme irrespectueuses chez les générations arrivées le plus récemment sur le marché du travail. La crainte de quitter son poste – et des conséquences – ou l’envie de ‘faire carrière’ en restant un certain temps en poste, semblent moins l’emporter chez les jeunes que la frustration, la colère ou l’envie de ‘ne pas se laisser marcher sur les pieds'”, soulignent les auteurs de l’étude dans un communiqué.

Un constat également valable lorsque l’on s’intéresse aux ‘principaux déclencheurs’ de véritables démissions, autrement dit lorsque les salariés ont réellement sauté le pas. Et dans ce cas, les motifs varient également selon les générations. Alors que le refus du télétravail se place en tête des raisons qui ont poussé l’ensemble des salariés à démissionner (20%), il n’arrive qu’en troisième position – mais avec une proportion plus élevée – chez les 18-30 ans (23%), derrière le fait d’être délogé d’un bureau ou d’une salle de réunion (24%), et de faire des heures supplémentaires non rémunérées (26%).

Plus de contraintes pour les jeunes ?

A en croire l’étude, les plus jeunes générations seraient (aussi) davantage confrontées à certains désagréments que leurs aînés. Près de la moitié des 18-30 ans (45%) déclarent faire des heures supplémentaires non payées, contre 36% du reste du panel, et plus d’un tiers (35%) affirment travailler avec des collègues qui ne connaissent pas leur prénom, contre 29% des salariés âgés de plus de 30 ans. Le refus du télétravail, pourtant cité comme le principal motif de démission par l’ensemble du panel, toucherait également davantage les moins de 30 ans (31%, contre 20% pour les autres salariés).

Si l’on s’intéresse maintenant aux salariés dans leur globalité, toutes générations confondues, sept sur dix regrettent de devoir composer avec partie ou intégralité de la charge de travail d’autres collaborateurs, dont 22% qui affirment être régulièrement confrontés à cette situation, et plus de la moitié de l’ensemble du panel (57%) confient ne pas se sentir encadré, sinon peu, par leur manager. Autre situation frustrante pour les salariés : la pause déjeuner. Près de trois répondants sur trois (29%) affirment n’avoir parfois même pas trente minutes pour souffler le temps d’un repas. Un problème qui serait même récurrent pour un quart des personnes interrogées. Autant de situations qui amènent les salariés à repenser leur lien avec le monde professionnel, et à trouver des parades, qu’elles se traduisent par un certain ressentiment ou une démission silencieuse, pour protéger leur santé mentale.