Ce soir, Nora Hamzawi foulera les planches de neimënster pour y présenter son one-woman show dans le cadre du Festival Humour pour la paix, l’occasion de découvrir en direct les névroses de la trentenaire à la queue de cheval savamment ébouriffée.

En vrai, Nora est heureuse, un peu râleuse et super chouette. Rencontre avec la girl next door qu’on aimerait toutes bien avoir comme copine.

Au bout de 10 ans de thérapie, est-ce qu’on se sent mieux?

On sait surtout mieux gérer l’insatisfaction!

Etes-vous une vraie râleuse?

Je m’inspire de choses qui me sont arrivées, mais je force le trait, je le pousse vers l’extrême. Plus qu’une râleuse, mon personnage est surtout celui d’une fille, mal dans ses pompes, qui ne se sent jamais bien là où elle se trouve.

Avez-vous toujours voulu être humoriste?

Absolument pas. Quand j’étais enfant, j’ai voulu exercer tous les métiers, d’hôtesse de l’air à fromagère (sourire). Ado, je rêvais d’être comédienne, mais ça me paraissait complètement inaccessible. J’ai décidé de suivre des cours de théâtre, et j’ai toujours beaucoup écrit. Quand j’ai commencé à travailler, je m’ennuyais. Une amie m’a conseillé de jouer mes textes sur scènes. Je me suis lancée.

Le cinéma vous tente?

J’aimerais, mais cela ne remplacera jamais la scène ni le plaisir d’écrire et de raconter mes textes.

En réalité, Nora est heureuse, alors?

Je suis une très grande angoissée, je ne suis jamais totalement satisfaite… Mais je consciente de ma chance d’exercer ce métier que j’aime.

Vous venez d’être jury au Festival d’Angoulême. La BD est-elle une passion?

J’ai été super surprise d’être sollicitée, car, même si j’adore les BD, je ne suis ni experte ni hyper pointue. Mais je suis ravie d’avoir eu 50 albums à lire.

Quels titres ont attiré votre attention?

Ceux qui ont été primés, bien sûr, mais mes deux coups de cœurs sont: Histoires Croûtes, d’Antoine Marchalot et Tulipe de Sophie Guerrive.

Comment est né le projet de livre 30 ans et 10 ans de thérapie?

J’ai été contactée par plusieurs maisons d’édition, mais la réflexion a duré longtemps. Je ne voulais pas simplement un assemblage de chroniques. C’est de là qu’est partie l’idée d’y ajouter des illustrations – pas les miennes, j’en suis incapable (sourire) – et des textes inédits. Je ne voulais pas d’un livre classique et je suis plutôt heureuse du résultat.

Vraie ex-fan des nineties ou running gag qui fonctionne bien?

C’est une amie qui m’a fait remarquer que j’en parlais souvent. Je ne m’en étais pas rendu compte. Les nineties renvoient à l’adolescence, l’âge auquel on se construit, où l’on se confronte pour le première fois au regard de l’autre… et fatalement où naissent les complexes… C’est une période clé.

Le premier souvenir que vous évoque cette décennie?

Les sweats Hard Rock Café et les slows sur Don’t Speak de No Doubt. C’était d’ailleurs super galère à danser car, à un moment, le rythme s’accélérait, et tu ne savais plus quoi faire (rires).

Comment vivez-vous la trentaine?

On n’est pas les adultes qu’on imaginait être. Et ça n’est pas plus mal!

Vous préférez la scène, la presse écrite ou la radio?

Dans la scène, j’aime le contact avec le public. A la radio, j’aime l’idée d’être protégée, même si, sur France Inter (elle tient une chronique tous les mercredis, NDLR.), on a un nombre incroyable d’auditeurs chaque jour. J’aime aussi le fait qu’il n’y ait que la voix. D’ailleurs, il faudra qu’on m’explique le concept de filmer la radio (rires)! Quand j’étais adolescente et que j’écoutais Fun Radio, je ne sais pas si j’aurais écouté aussi longtemps s’il y avait eu des vidéos en plus de la voix.

Votre débit de parole est-il dû au trac ou est-ce un effet recherché?

Quand j’ai commencé, on m’a félicité pour ma diction, rapide et claire. Mais je reconnais que c’était surtout pour ne pas laisser de place aux blancs (sourire). Depuis, j’ai appris à en jouer, et des silences également.

Est-ce que vous googlez encore votre nom?

De moins en moins (sourire). C’est la maturité!

Peut-on rire de tout?

Si on est drôle, oui (sourire). Moi, je ne ris pas de tout, car tout ne me fait pas rire. L’actu, par exemple. Je pense aussi que pour être drôle, il faut bien maîtriser son sujet, pour éviter de tomber dans les idées reçues.

C’est la première fois que vous venez à Luxembourg. Comment vous sentez-vous?

Je suis heureuse, en plus il me semble que c’est sold out. Ça fait super plaisir. J’avoue n’avoir aucune idée du public que je vais rencontrer.

Vous présentez votre spectacle dans le cadre du Festival Humour et Paix: l’humour est-il une arme?

Je ne sais pas s’il l’est, mais en tous cas rire est nécessaire pour réinjecter un peu de légèreté dans nos quotidiens si anxiogènes. Chez moi, l’humour n’est pas militant.

Faites-vous évoluer votre texte en fonction des villes dans lesquelles vous jouez?

Non, assez peu. Mais je le maîtrise de mieux en mieux, ça me permet plus de liberté. Si je sens qu’un sujet ne marche pas, je vais le passer plus rapidement, mais en le tournant en dérision. On s’adapte toujours aux réactions du public, la scène est un échange entre lui et moi.

Une manie avant de monter sur scène?

Je mange des réglisses, parce que ça fait augmenter la tension (sourire). Et j’arrive le plus tard possible en loges, pour ne pas angoisser. J’aime bien qu’on me dise «merde», aussi (sourire).