Quatre albums en dix ans, c’est peu, mais c’est beaucoup à la fois. Car chacun des opus des Françaises Brigitte s’offre comme un petit morceau d’elles. Nues, paru en novembre 2017, célèbre cette décennie d’amour, d’amitié, de féminité et de force.

A l’occasion de leur venue à la Rockhal, mardi 17 avril, nous avons posé quelques questions à Aurélie Saada.

Vous avez posé vos micros à Luxembourg à l’occasion de chacune de vos tournées. Comment appréhendez-vous ce nouveau show ?

Avec joie, notre dernière venue avait été un moment merveilleux. C’est notre troisième tournée, et c’est comme si l’on retrouvait de vieux amis. La première fois, on se découvre. La deuxième, certains apprennent à nous connaître, d’autres reviennent. Le troisième concert est un vrai rendez-vous d’amitié, plein de douceur, de chaleur. Il y a vraiment une relation particulière qui se tisse avec notre public.

Vos concerts sont à la fois intimistes et dansants, grâce notamment à une scénographie très étudiée. Comment parvenez-vous à cette alchimie ?

C’est vrai que nous y prêtons une attention particulière, mais comme pour tout, en fait : les textes, les mélodies, les arrangements. On cherche avant tout à ce que ce soit le plus sincère possible. Sylvie et moi nous amusons toujours énormément lorsque nous sommes sur scène, et je pense que cela se ressent. On y met beaucoup d’amour et de joie. Nous avons tous besoin de cela.

Sur ce troisième album, vous avez écrit la plupart des textes seule. Pouvez-vous nous en parler ?

C’est vrai. Pour des raisons personnelles, je suis partie vivre durant une année avec mes filles à Los Angeles. La distance, le décalage, la solitude… tout cela vous colle à vos émotions. Vous ne pouvez vous y soustraire. Du coup, cette expérience a été très féconde, et j’ai ressenti ce besoin d’exprimer tout ce qui se passait en moi. Sylvie l’a compris, et m’a laissée carte blanche, avec pudeur. Elle est venue me rejoindre trois fois pour enregistrer ensemble.

Ce besoin de solitude n’aurait-il pas pu mettre fin à votre duo ?

Avec Sylvie, nous nous aimons, nous nous comprenons. Nous sommes devenues amies à force de travailler ensemble. On se regardait et on s’admirait, j’ai pris les devants et lui ai proposé de faire un groupe. Après tout s’est passé avec beaucoup de naturel et d’intuitivité. Nous partageons la même joie, la même euphorie, le même désespoir, cela ne pouvait qu’aboutir à quelque chose ! Cet éloignement temporaire a été, d’une certaine façon, une manière pour nous de renouveler nos vœux. Nous pouvons être différentes et ensemble. Si l’une de nous a des émotions, elle peut les mettre dans Brigitte, l’autre sera là pour la soutenir et la porter.

Justement, alors que vous jouiez la carte de la gémellité sur votre deuxième album, vous vous distinguez à nouveau pour Nues. Pourquoi ?

Après A Bouche que veux-tu, les journalistes tenaient absolument nous opposer (rires) ! On nous demandait sans cesse : laquelle est la plus extravertie, laquelle est la plus réfléchie, etc. On a décidé de pousser le jeu jusqu’à se confondre et à devenir de parfaites jumelles. Pourtant on ne se ressemble absolument pas ! Nous nous sommes beaucoup amusées avec des perruques, des robes, du maquillage. Au moment de sortir Nues, nous avons eu la sensation d’être arrivé au bout de ce concept. On a eu envie de se débarbouiller, de se débarrasser de tous les artifices, pour montrer ce qu’il y a tout au fond. Même si on adore les paillettes, les perruques, les frivolités, on a ressenti le besoin de raconter l’envers du décor.

Qui est Brigitte ?

Elle est toutes les femmes. Il y a vraiment un hommage à Brigitte Bardot, Brigitte Lahaye ou Brigitte Fontaine, comme on l’a souvent dit de nous, mais pas souvent. C’est un hommage à toutes les femmes, nos sœurs, nos amies, la voisine, la dame de la cantine (sourire) ! Brigitte est singulier et pluriel, tout en paradoxe et en complexité. Elle est complexe et plurielle, différente et ensemble, profonde et légère, sombre et rieuse, insouciante et grave. Brigitte est tout et son contraire à la fois.

Comment définiriez-vous le féminisme selon Brigitte ?

Il me faudrait toute une journée pour répondre à cette question (rires) ! Je dirais un combat pour la liberté et pour l’égalité, et, surtout, que l’on n’a pas besoin de ressembler à un garçon pour être une femme libre.

Crédit photo : © Shelby Duncan