La Mostra de Venise a envoyé un nouveau signal féministe en décernant à l’unanimité son Lion d’or à une réalisatrice, Audrey Diwan, pour un film cru et intimiste sur l’avortement, L’événement, deux mois après la Palme d’or à une autre Française.
“Malheureusement quand vous travaillez sur l’avortement, vous êtes toujours dans l’actualité“, a déclaré en recevant son prix la réalisatrice française de 41 ans, qui a expliqué avoir “fait ce film avec colère et désir“.
Le vent tourne dans le bon sens
“Je voulais que ce soit une expérience“, un “voyage dans la peau de cette jeune femme“, a ajouté celle qui succède à la Sino-Américaine Chloé Zhao, 39 ans, couronnée l’an dernier pour Nomadland avant de triompher aux Oscars. Quatre ans après l’affaire Weinstein et le début du grand examen de conscience du 7e art, l’ouverture très progressive des palmarès les plus prestigieux aux réalisatrices se confirme. En juillet, le Festival de Cannes avait distingué une jeune réalisatrice française, Julia Ducournau, 37 ans, Palme d’Or avec l’ovni Titane, un film féministe qui dynamite à sa façon les frontières entre les genres.
“Quelque chose est en train de changer. Une femme a gagné l’Oscar, une femme a gagné la Palme d’or, une femme a gagné le Lion d’Or. Ca signifie forcément quelque chose, ça ne peut pas être le hasard“, a souligné Audrey Diwan.
L’engagement récompensé
Son film, adapté du récit autobiographique éponyme de la romancière Annie Ernaux, se déroule dans la France des années 1960, avant la légalisation de l’avortement. Il montre le parcours d’une jeune étudiante qui tombe enceinte, interprétée par la Franco-Roumaine Anamaria Vartolomei.
C’est le deuxième film d’Audrey Diwan, romancière et journaliste française d’origine libanaise, qui a co-signé le scénario de plusieurs films dont Bac Nord ou La French de Cédric Jimenez, puis est passée à la réalisation (Mais vous êtes fous). Elle devient la quatrième réalisatrice à recevoir le prix le plus prestigieux à Venise depuis l’an 2000.
Jane Campion et Penelope Cruz
Dans le reste du palmarès, plusieurs films sont marqués eux aussi par ces questions. C’est le cas du Pouvoir du Chien, de Jane Campion, qui a permis à la Néo-Zélandaise de remporter le prix de la meilleure réalisation, 28 ans après sa Palme d’Or pour La leçon de Piano.
Dans un huis clos étouffant dans un monde de cow-boys, avec Benedict Cumberbatch et Kirsten Dunst, le film aborde la question de la masculinité exacerbée et toxique. “Un mur de Berlin est en train de tomber“, a déclaré Jane Campion, à propos de la présence des femmes au palmarès.
Le jury a décerné le prix de la meilleure actrice à Penélope Cruz, pour son rôle dans Madres Paralelas, de Pedro Almodovar, qui continue avec son actrice fétiche à célébrer la force des femmes et des mères face à des hommes lâches ou absents.
Vent de fraîcheur
Chez les acteurs, le jury a distingué le Philippin John Arcilla pour son rôle de journaliste en quête de vérité dans “On the Job 2: The Missing 8“.
Après une édition 2020 en demi-teinte, marqué par la pandémie et un manque de films marquants en compétition, la Mostra de Venise, le plus ancien des festivals de cinéma au monde, a retrouvé tout son lustre. Et son influence s’est une fois de plus mesurée à l’aune des stars américaines, qui se sont pressées sur le tapis rouge du Lido, devenu au fil des années une rampe de lancement avant la saison des Oscars.
Matt Damon et Ben Affleck ont monté les marches pour Le dernier Duel de Ridley Scott, quelques jours après les vedettes de Dune : Timothée Chalamet, Rebecca Ferguson, Zendaya, Oscar Isaac et Javier Bardem.