Forte de plusieurs expériences professionnelles aussi riches que différentes, Valérie Dubois a fondé sa propre société il y a plus de 20 ans et a créé sa propre marque, Diversity, voilà quatre ans. 

Si son sens créatif est une grande force, sa capacité à faire collaborer les gens pour créer des projets à dimension humaine l’est encore davantage et l’a conduite au beau succès qu’on lui connaît aujourd’hui. Rencontre avec une cheffe d’entreprise à la nature profondément généreuse et déterminée.

Pourquoi avoir choisi de travailler dans l’univers du textile?

C’est une histoire de petite fille. Depuis l’âge de huit ans, je crois. Plusieurs facettes de ce métier m’ont plu: la créativité, bien sûr, mais également la diversité des champs de compétence, et, surtout, la dimension multiculturelle que ce secteur revêt. Je travaille avec des gens de cultures différentes, mon métier m’amène à voyager en permanence.

Quelles sont les grandes étapes de votre parcours?

J’avais déjà un poste qui m’attendait à la fin de mon master. J’ai intégré le groupe Alain Manoukian (devenu à présent BCBG Max Azria, ndlr.), en tant que responsable de la coordination entre la direction artistique et le pôle commercial. Je devais parvenir à faire travailler ensemble des gens qui n’ont pas la même vision du produit, afin de développer des collections dans l’ADN de la marque, mais qui se vendent, qui parlent aux clients. Puis j’ai été débauchée pour intégrer Unibail-Rodamco, un groupe spécialisé dans la gestion, la promotion et l’investissement de centres commerciaux. Ces deux expériences ont été déterminantes pour la suite. J’ai ensuite eu l’opportunité de pouvoir ouvrir ma propre structure, au Luxembourg, dans l’import-export textile, comme agent d’usines spécialiste des écharpes et des pull-overs. C’était il y a plus de 20 ans, et le secteur a beaucoup évolué. Alors qu’au début je travaillais essentiellement avec des créatifs, ceux-ci ont de plus en plus laissé place à des commerciaux. J’ai dû m’adapter, ajouter des cordes à mon arc, jusqu’à, finalement, offrir à mes clients du «prêt à vendre» en intégrant dans mon approche, la conception de collections spécifiques. Puis un jour, mes partenaires indiens m’ont demandé pourquoi je n’avais pas encore ma propre marque. Ils m’ont soutenue et c’est ainsi que Diversity est née, il y a quatre ans.

Créer votre propre société: une évidence?

Tout à fait, j’étais portée par ma volonté d’indépendance. Mais cela n’a pas été une transition facile. Passer du statut confortable de salarié au sein d’un grand groupe, avec tous les avantages que cela comporte, à la solitude de l’entrepreneur a été très difficile. Il y a plus de 20 ans, si j’avais eu la chance d’avoir le soutien d’une structure comme la FFCEL (Fédération des Femmes Cheffes d’Entreprise au Luxembourg), j’aurais sans aucun doute gagné du temps. J’aurais pu partager mes interrogations, bénéficier du conseil de personnes plus avancées que moi dans leur projet.

Être une femme a-t-il été un frein?

Je ne me suis jamais posé la question de cette manière, car j’estime que l’entrepreneuriat est no gender. Ce qui est le plus cocasse dans mon parcours c’est que ce sont mes partenaires indiens, qui sont les personnes les plus exigeantes et sans concession, avec lesquelles je travaille – des hommes, plus âgés, d’une culture totalement différente de la mienne – qui m’ont le plus poussée et m’ont amenée à me dépasser à donner le meilleur de moi-même. Sans eux, je n’aurais peut-être pas créé Diversity.

Où puisez-vous votre force?

Dans les projets collaboratifs. J’aime réfléchir, rendre ces idées opérationnelles et surtout concrètes. Je suis très pragmatique. Et j’apprécie pouvoir impliquer des gens différents, mais complémentaires.

Avez-vous des rituels?

Mon petit-déjeuner (rires). C’est tout un rituel. Cela commence avec la vaisselle que j’utilise: un petit plateau d’argent marocain,un verre Beldi, un bol indien, une petite cuillère qui provient de Chine. Et une magnifique tasse offerte par mes enfants, sur laquelle est inscrit: “Big things often have small beginnings”. Lire ce mantra chaque matin me donne une énergie folle. Il y a de la couleur: je mange des fruits, mon crunchy au miel arrosé d’un nuage de lait de riz et un jus oranges-carottes et gingembre. Comme je me lève très tôt, ce rituel me donne l’impression que le monde m’appartient. A cet instant, tout me semble possible.

Y a-t-il une personne qui vous inspire, avez-vous un modèle?

Tory Burch, une incroyable cheffe d’entreprise dans le secteur du prêt à porter luxe et qui a su donner une dimension éthique et humaine à son entreprise. Elle œuvre notamment largement dans la promotion de l’entrepreneuriat au féminin à travers sa fondation. Il y a aussi Ratan N. Tata, une référence en Inde. Ces deux personnes partagent le point commun d’être des architectes d’entreprises, en quelque sorte, qui ont su donner du sens à leurs projets  avec une dimension profondément humaine et respectueuse.

Quel conseil donneriez-vous aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat?

Ne pas hésiter à rencontrer, échanger avec d’autres entrepreneurs et travailler sur le partage d’expériences. Il faut trouver des solutions pour  éviter à tout prix le risque d’isolement du chef d’entreprise. Être ouvert aux conseils que l’on peut recevoir, à l’écoute et faire preuve d’une grande humilité, avec une détermination à toute épreuve. Je pense également que la phase de réflexion et de préparation avant de se lancer dans le projet est cruciale. Elle conditionne en partie la réussite de sa future entreprise.

 

Crédit photo: ©Gaël Lesure