Le discours tenu par Xi Jinping, sur la place Tienanmen à l’occasion du centenaire du Parti Communiste Chinois, a eu le mérite de définir clairement ce qui attend la société chinoise. Il a informé tous « les gens et amis partout dans le monde qui ont montré de l’amitié envers le peuple chinois et qui comprennent et soutiennent les efforts de la Chine en matière de révolution, développement et de reformes. »
Les normes de la « grande culture traditionnelle ».
Mettant l’accent sur les 5 000 ans d’histoire de la Chine, Xi a fixé les objectifs pour le siècle à venir. Sous la direction du parti et au nom du peuple chinois, « le socialisme avec des caractéristiques chinoises est rentré dans une nouvelle ère ». « Nous devons adapter les principes de base du marxisme aux réalités spécifiques de la Chine et à sa grande culture traditionnelle. »
La « grande culture » s’est abattu de plein fouet sur diverses catégories socioprofessionnelles dont les méga-entrepreneurs et le monde du show-biz. On a noté une reprise en main sans précédent d’une économie dans laquelle le parti veut imposer ses visions, aux lois du marché.
Celle-ci s’est accompagné de contrôles selon les directives morales et éthiques du parti, avec comme corolaire une chute en bourse des valeurs chinoises et des disparitions d’entrepreneurs probablement jugés toxiques. Le parti veut faire régner la « paix, la concorde et l’harmonie » qui suivant le discours de Xi, « sont des idées que la nation Chinoise a poursuivies et pratiquées pendant plus de 5000 ans » A cette fin il vient d’annoncer la création d’une nouvelle bourse de valeurs à Pékin destiné aux PME du pays.
Le showbiz, une « culture chaotique ».
Selon la presse internationale, la répression a touché le showbiz de diverses manières. Marqué par plusieurs gros scandales, le secteur croule sous les avertissements-amendes sous prétexte d’évasion fiscale.
Il y a deux semaines, l’actrice Zheng Shuang a reçu une amende de 39 millions d’euros. Elle a perdu son contrat avec Prada et selon <businessoffashion.com> du 27 août dernier, elle se serait refugiée aux Etats-Unis. D’autres acteurs et chanteurs ont également été censurés et accusés de divers maux comme d’avoir des attitudes de « play boy ». La pop star canado-chinoise Kris Wu, acteur et producteur, ambassadeur de Louis Vuitton, a été arrêtée par la police à Péking début août sous des accusations de viol.
L’actrice Zaō Wei 45 ans, icone de Fendi, l’une des actrices et businesswoman les mieux payées et les plus populaires du pays, a disparu. Newsweek s’interrogeait sur le devenir de celle que l’hebdomadaire gratifiait d’une réussite remarquable. Son nom est rayé des réseaux et des génériques de films. Selon le site <Hollywood reporter> du 29 août dernier, elle aurait fui en France avec son mari. Elle aurait été vue à Bordeaux où le couple possède un grand cru St. Emilion, le « château Monlot ».
Les Chanel, Fendi, Lanvin, Pandora, Tasaki (joaillier japonais), Louis Vuitton cherchent des stratégies de distanciement et de d’adaptation aux nouvelles lignes morales du parti communiste chinois. Pour les grandes marques, il est difficile de rester conforme aux codes du moment au vu de la volatilité des prescriptions des censeurs dans laquelle chaque administration spécifique fait du zèle. L’énormité du marché compense ces contraintes tactiques.
Le parti et ses organes veillent
Dans le but de réguler la culture chaotique du showbiz, les acteurs et les chansons qui risquaient de mettre en cause l’unité nationale et la souveraineté de la Chine, sa sécurité et l’honneur national, ont été bannis, et leurs sites web, effacés. L’administration de la radio télévisons chinoise (ART) a informé que seront exclus tous comportements anormaux et malsains. Les émissions montrant des comportements efféminés et autres attitudes décadentes, vulgaires avec des acteurs maquillés projetant une image féminine et étalant une richesse ostentatoire passeront à la trappe.Toutes émissions impliquant des classements de célébrités ont été prohibées car jugés « malsaines ». Les programmes devront « promouvoir vigoureusement l’excellente culture traditionnelle chinoise, la culture révolutionnaire et une culture socialiste de pointe. » Et surtout les jeunes chinois doivent devenir plus virils. Un article paru dans un journal militaire exprimait que ce genre d’attitude efféminée était susceptible de détruire les valeurs des jeunes. Il conviendra de cultiver « une attitude patriotique »
Les stars, toutes catégories confondues, sont « invitées » à faire de l’auto-critique, suivre des cours sur la glorieuse histoire du parti communiste et des séminaires de comportement.
D’ailleurs diverses de ces célébrités ont fait, fin août, lors d’un évènement officiel des déclarations critiquant ceux qui ont franchi la ligne rouge et sont devenus « des esclaves du marché ».
Un grain de sable : les « Tang Ping »
Sous ce terme, qui veut dire « être allongé », se cache un mouvement de protestation contre ce style vie chinois : le 996, soit travailler de 9 heures du matin à 9 heures du soir 6 jours par semaine. Ils revendiquent de travailler de manière plus cool, de jouir de la vie, de leur famille et de leur travail. Ils préfèrent être « allongés » et laisser passer le stress loin d’eux.
Selon la BBC du 3 juin dernier, un post publié sur un des forums du pays avait fait le buzz. Il disait: « Etre allongé est un mouvement sage ». C’est seulement en s’allongeant que les humains peuvent prendre la mesure de toute chose”. Pour un jeune diplômé, chercher une vie simple et une nourriture simple évitent le stress et surtout le bonheur des 996 tel qu’imposé par parti. Il ne s’obtiendrait qu’en travaillant très dur.
Dans une économie qui manque de main d’œuvre, ce texte fut censuré immédiatement mais pas assez rapidement pour éviter de devenir iconique. La jeunesse supporte de plus en plus mal l’obsession du contrôle idéologique et culturel. Elle le manifeste entre autres en s’exprimant contre le boycott grandissant de sociétés et de marques étrangères.