Les points communs entre le monde médical, le secteur bancaire ou les ressources humaines ? Sans aucun doute l’organisation et l’empathie : deux valeurs au cœur de la société Space & Time, que dirige Isabelle Wachenheim.

Généreuse, mais redoutable, discrète, mais profondément tournée vers l’humain, la fondatrice de Space & Time évoque sa profession et sa fonction de cheffe d’entreprise.

S’il n’y avait qu’une seule chose à retenir de votre parcours, ce serait…

Dense ! Depuis la création de Space & Time, je vis à cent à l’heure, j’ai mille projets en tête, dont plein encore à faire ! C’est vraiment un beau challenge !

Qu’est-ce qui vous a poussé à créer votre propre société ?

J’ai un parcours… disons très éclectique. En 2011 ? J’ai pris la décision de reprendre mes études. Et, durant cette période, cela s’est imposé à moi comme une évidence : je ne pouvais revenir au statut de salariée. Pour la petite anecdote, le manque de congés m’avait poussée à quitter mon poste de DRH. J’aspirais à d’autres horizons, et à une manière différente d’appréhender le travail.

Avez-vous fait des choix de carrière que vous avez regrettés ?

Non. Des portes se sont ouvertes, des personnes m’ont accordé leur confiance, m’ont poussée vers un nouveau job avec davantage de responsabilités. Chaque rencontre, ou presque, a contribué à tracer mon chemin. Je suis ainsi passé du monde médical au secteur bancaire, pour aller vers les ressources humaines…   Je ne me voyais pas rester 40 ans au même endroit, j’ai besoin que ça bouge ! J’ai saisi les opportunités et je n’ai pas eu peur de me lancer ou de changer de voie. Courage ou inconscience, je ne sais pas (rires) !

Vous mettre à votre compte était-il une priorité ?

Tant que j’étais salariée, je n’y songeais pas. Pourtant, dans mon entourage, nombreuses étaient les personnes à ne pas comprendre pourquoi je n’osais pas me lancer. Quand j’y repense, je n’étais tout simplement pas prête à ce moment-là. Jusqu’à ce que cela devienne une évidence !

Quelles difficultés avez-vous rencontrées en créant votre société ?

Pas vraiment non. Il faut dire que j’ai été à la bonne école : mes parents étaient commerçants. Ils m’ont donc très tôt inculqué des valeurs comme la satisfaction du client, gage de sa fidélité. Sans oublier qu’un client vous recommandera autour de lui. Ensuite, j’ai choisi un métier en lien avec mes expériences passées, aussi diverses et variées soient-elles. J’ai approfondi mes connaissances en reprenant mes études. Ma société est née en même temps que je trouvais mon premier client. J’ai la chance d’avoir une clientèle fidèle, j’espère que cela va continuer ainsi (sourire) !

De quels appuis avez-vous bénéficié ?

Je n’ai perçu aucune aide financière, mais le soutien de mes proches a été fondamental durant cette période.

Est-ce important de rallier un mouvement fédérateur ?

J’aime faire des rencontres, quelles qu’elles soient. Alors si une association peut les faciliter, pourquoi pas ? Que ce soit au cours d’une soirée, ou lors de rendez-vous plus formels, j’ai besoin d’aller vers les gens, de faire connaissance avec de nouvelles personnes. C’est très enrichissant et source d’épanouissement. C’est fondamental de rester ouvert sur le monde.

Vous adhérez notamment à la FFCEL, qu’est ce que ce réseau vous apporte ?

La Fédération des Femmes Cheffes d’entreprise du Luxembourg organise régulièrement des soirées à thèmes, et y convie des intervenants très pertinents. Ces soirées sont très éclairantes. Côtoyer des personnes confrontées aux mêmes problèmes et vivant les mêmes expériences permet de se remettre en question.

Depuis quelques années, le coaching a le vent en poupe. Comment parvenez-vous à vous distinguer ?

Je ne me considère pas comme coach. Je suis consultante et médiatrice certifiée. Je parlerai donc davantage d’accompagnement personnel, même si nous utilisons parfois des méthodes similaires.

Quelle est la différence entre ces trois fonctions ?

Je pense qu’un coach est plus un guide qui vous aide à trouver votre propre chemin. Le travail du consultant s’oriente vers davantage de méthodologie, d’analyse et de bonnes pratiques à mettre en œuvre.

Pourquoi avoir choisi de travailler sur l’organisation en particulier ?

J’ai eu la chance de travailler pour des entreprises bien structurées, mais également pour des sociétés bien moins organisées. Cela m’a permis de comprendre que l’organisation et les ressources humaines étaient les deux piliers de l’entreprise. J’ai eu la chance de travailler pour des entreprises bien structurées puis j’ai également connu des sociétés moins bien organisées. J’ai aussi compris que l’organisation et les ressources humaines étaient les deux piliers de l’entreprise. Mon expérience explique également ce choix : mes postes de manager m’ont permis de comprendre que je ne faisais pas grand-chose sans mes équipes ; ma carrière médicale m’a appris à gérer mon stress. Enfin, j’ai pu constater à plusieurs reprises que mes collaborateurs mis sous une pression trop forte courraient le risque de davantage de stress, de fatigue, d’inquiétude et de démotivation. Ainsi l’organisation s’est imposée à moi comme étant primordiale pour vivre mieux. Elle ne doit ainsi pas être comme une corvée, mais un plaisir. Être organisé permet de dégager du temps pour faire plein de choses … ou ne rien faire (sourire) !

Quelle est votre démarche ?

Faire du conseil en organisation, c’est démarrer avec une page blanche. Cela implique d’abord de comprendre l’entreprise avec laquelle vous allez travailler. Je ne fais pas de copier/coller d’une société à l’autre. Je m’adapte en fonction de leurs souhaits, de leurs attentes et de leurs prérequis… Je m’imprègne de la culture, je demande à rencontrer les personnes clés et travaille en étroite collaboration avec les décideurs. Toute mission organisationnelle débute par un audit, une phase de réflexion stratégique et un plan d’action. Avec les personnes privées, la démarche est assez similaire. Tous deux viennent avec une problématique qui, en réalité, est rarement le vrai problème. Alors on creuse un peu plus. Dans les deux cas, une relation de confiance est primordiale.

De quelles compétences un bon manager doit-il faire preuve ?

C’est une question délicate, car c’est un métier difficile. Un bon manager doit être proche de son équipe, bon communicant, à l’écoute, disponible… La plupart disent qu’ils manquent de temps… mais cela relève d’un problème organisationnel ! Ensuite il se doit d’être crédible et pour ce faire, il doit avoir un minimum d’expérience. Enfin, j’insisterai sur l’importance du parler-vrai, d’être authentique et de ne pas hésiter à dire les choses. Tout en y mettant les formes, bien sûr (sourire) ! Il se doit également d’être innovant et de ne pas avoir peur du changement.

Comment parvenez-vous à jongler entre vie professionnelle et vie personnelle ?

Je pense qu’il ne faut pas scinder vie personnelle et professionnelle, mais plutôt y voir une seule vie à gérer. Au travail, on passe des appels privés ou des SMS personnels. Certains collègues sont des amis. Durant la journée, on songe parfois à sa soirée ou aux courses à faire en rentrant. À la maison, on lit ses mails le dimanche soir, on pense à sa réunion du lundi, quand on n’y emmène pas ses dossiers pour les finir le week-end. Ajoutez à cela certaines entreprises qui proposent des cours de sport ou des séances de relaxation, ou encore celles qui disposent d’une conciergerie où m’on laisse son linge à laver ou repasser… Ces deux mondes s’entremêlent désormais constamment et la frontière entre les deux tend de plus en plus à disparaître. C’est pourquoi il est préférable de voir une seule vie à gérer au mieux. Nous n’avons pas de bouton on/off !

Être une femme dans l’entrepreneuriat : faiblesse ou force ?

Étant une femme, je vais forcément vous répondre une force (rires) ! Plus sérieusement, nous avons des atouts que les hommes n’ont pas et inversement. Les femmes sont souvent plus prudentes et organisées, et, par la force des choses, multitâches. Les hommes, eux, voient les choses en grand et plus loin. C’est pourquoi il est fondamental d’apprendre à travailler ensemble. C’est cette mixité qui, justement, est riche et intéressante.

Quels sont vos rituels ?

Par rituel, on entend habitude et je n’aime pas les habitudes. Mais s’il faut trouver une réponse, je dirais que je n’ai pas de TV et ne suis pas accro aux réseaux sociaux. Je n’aime pas téléphoner. Je choisis avec soin mes amis et mes sorties et je prends du temps pour me ressourcer.

Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui souhaitent de lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat ?

Foncez ! Certes, ce n’est pas toujours facile, mais c’est véritablement passionnant.