Ce petit bout de femme blonde est capable de rhabiller votre intérieur de la cave au grenier, ou presque. Rencontre avec un personnage haut en couleur.

Depuis trois ans, Nadine a «sa petite boutique», affectueusement baptisée ‘Chez Soi’. Chez elle, elle coud. Des rideaux, des coussins…

Qu’est-ce qui vous a amené à créer votre propre société?

J’ai toujours rêvé de me mettre à mon compte, d’avoir «ma petite boutique». Ensuite, il y a eu plusieurs éléments déclencheurs, qui m’ont poussée à sauter le pas, et notamment un ras-le-bol de mon emploi. J’avais atteint les limites, et depuis longtemps. Ajoutez à cela un manque de reconnaissance… Il était temps de partir. Et puis j’ai eu l’opportunité de le faire, quand mon compagnon m’a proposé de m’épauler. Alors je me suis lancée!

A 50 ans?

Oui oui, à 50 ans. Il faut peut être une bonne dose de courage, pour se lancer à cet âge-là. Ou de naïveté! (rires).

Avez-vous des regrets?

Un seul: ne pas l’avoir fait plus tôt. Posséder me procure un tel bonheur et me donne tant de fierté… Il m’a fallu attendre 50 ans, mais à présent je peux l’affirmer: je suis vraiment épanouie.

Avez-vous suivi une formation?

Non. J’avais déjà pas mal d’années d’expérience derrière moi. Pour le reste, j’y suis allée en autodidacte.

Avez-vous rencontré des difficultés?

Administrativement, non.

La seule ombre au tableau est que lorsque vous quitter votre employeur pour monter votre propre boîte, dans le même domaine, cela n’est pas forcément vu d’un bon œil. Et ça a été le cas. J’ai été très déçue par le comportement de mon ancien patron, qui a tenté de me mettre des bâtons dans les roues en intimidant les représentants. Dans un petit pays comme Luxembourg, vous n’avez qu’un représentant par marque, cela a donc compliqué les choses. Mais si l’on voit le verre à moitié-plein, et c’est la ma philosophie, cela m’a amené à être inventive, et à aller voir d’autres firmes. Donc, au finale, cela a été une expérience enrichissante. Et puisque la patience est une vertu, ils sont revenus, d’eux-mêmes cette année. Il faut croire en sa bonne étoile. (sourire) Fort heureusement, tout cela est derrière moi, maintenant!

Votre plus grande fierté?

Avoir créer ma propre société. C’est mon bébé, vous savez. Et d’être encore là. Et, surtout, cette année, j’ai pu embaucher ma première employée, à mi-temps, depuis septembre. Je fais aussi appel à un indépendant pour les montages. Ca fait plus pro que lorsque que je venais avec Eric, mon compagnon. Et c’est bien la preuve que ça marche du tonnerre! (rires)

Être une femme, est-ce un frein ou un atout, selon vous?

Malheureusement, c’est un frein. Quand j’arrive avec mes outils, les gens me demandent «vous êtes toute seule?». Il y a encore trop d’a priori, surtout pour les professions physiques, comme la mienne. Cela dit, une fois qu’ils voient la qualité du travail, ils sont bluffés, et vous gagnez alors totalement leur confiance. Ils voient de quoi vous êtes capable, alors que vous êtes une femme. C’est valorisant. Malgré tout, j’aurais préféré être un homme. (rires).

Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui souhaitent se lancer?

Il faut se faire confiance et oser. Avoir une épaule peut aider. Sincèrement, si mon compagnon ne m’avait pas soutenue, psychologiquement certes, mais surtout financièrement, je n’aurais pas pu le faire. C’est la triste réalité. Je ne peux me prendre un revenu que depuis cette année. Si l’on n’a pas des économies qui permettent de suivre, c’est très lourd à assumer. Je lui suis très reconnaissante.

Ne jamais regretter également. C’est un bon conseil. Et si on se trompe? Eh bien, ça n’est pas si grave, on se relève et on recommence.

Quels sont vos challenges à venir?

Il y en a plein. J’aimerais pouvoir embaucher mon employée à temps-plein, mais ça ne saurait tarder. Pouvoir prendre une deuxième couturière serait formidable également! Et surtout continuer. Si je suis encore là dans 10 ans, je serai la femme la plus heureuse du monde. Et apprendre encore et encore.

Et justement, que vous reste-t-il à apprendre?

On apprend toujours, tous les jours. Il y a sans cesse de nouveaux tissus, de nouvelles techniques. Il y a tant de tissus à découvrir. Même si l’on reste toujours dans les mêmes choses. Les intérieurs sont trop uniformes. Je rêve de mettre de la couleur, du peps. Mais les gens ne me demandent que de coudre du crème. Ah non, on ne dit plus «crème», on dit «perle de lait»! (rires)