Par Marie Santer

L’homme que je ne devais pas aimer est le deuxième roman d’Agatha Ruga. Son premier roman est Sous le soleil de mes cheveux blonds, paru en 2019 chez Stock. Dans ce second renom paru en 2022, l’auteur nous offre un roman qui navigue délicatement entre la fiction et la réalité.

Un besoin viscéral de liberté 

Ariane est une femme d’une trentaine d’années avec une vie qui pourrait être qualifiée de parfaite ; mère de trois filles, elle a un mari aimant, consacre sa vie à la littérature. Dans ce petit monde, Ariane croise un regard. Un regard qui la perturbe, un regard qui va lui devenir indispensable, nécessaire. 

Ce regard c’est celui de ce beau jeune homme qui tient un bar dans sa petite ville. Tout les oppose et pourtant c’est une quête malsaine qui démarre. Ariane le veut lui, veut se sentir désirée, libre à nouveau. C’est entre cette envie irrépressible de liberté et cette culpabilité de mère qu’Agathe Ruga nous fait voyager dans cette histoire où seule la liberté a sa place. 

« On ne naît pas femme, on le devient »*

Agathe Ruga nous offre un roman plein de violence sur ce qu’est être une femme libre. Ariane est une femme de laquelle on dira « elle a tout pour être heureuse », elle est mère, épouse mais où est passé son statut de femme, car dans cette vie parfaite, Ariane s’oublie. C’est une quête de soi que nous offre l’auteure. 

Ariane est une femme pleine d’envie, de désir, rongée par une absence qui ne se comble pas. Elle est cette petite fille qui a connu l’amour de la vie de sa mère, cet homme qui l’a vu grandir, mais qui est sorti de sa vie aussi rapidement qu’il y est entré.  Agathe Ruga pose cette question essentielle, quelle est la place de l’absence dans la vie parfaite d’une femme ? Devrait-elle être ignorée car le passé appartient au passé ? Devrait-elle être comblée jusqu’à en devenir une obsession ? 

Cette petite fille devenue femme porte une souffrance sur laquelle on ne pose pas de mot. Cette souffrance qui la pousse dans les bras de ce jeune homme, cette souffrance qui lui hurle d’exister. Cette souffrance la pousse à vivre, vivre comme si demain n’existait pas, à croquer à pleines dents sa liberté, sa liberté chérie.

C’est dans ce roman plein de tendresse et de justesse qu’Agathe Ruga nous conte la vie de cette femme qui hurle son existence dans cette société masquée où elle ne se reconnaît plus. Un roman nécessaire pour définir l’essence du féminisme.

* Simone de Beauvoir