Le 11 juin dernier l’Observatoire Européen des Drogues et des Toxicomanies publiait son rapport annuel sur l’état des consommations de stupéfiants dans l’union européenne, l’occasion d’une réflexion sur cette gangrène de nos sociétés. L’Europe politicienne semble se réveiller.

Par Cadfael

Pas d’optimisme en vue

« L’un des messages clés du rapport de cette année est que la «polyconsommation » c’est-à-dire la consommation, simultanée ou successive, de deux ou plusieurs substances psychoactives, est aujourd’hui courante en Europe. Qu’il s’agisse de la consommation de benzodiazépines avec des opioïdes ou de cocaïne avec de l’alcool, ce mode de consommation peut accroître les risques pour la santé et compliquer la mise en œuvre des interventions (par exemple, en cas de surdose). Ces difficultés sont encore plus compliquées lorsque les personnes consomment des mélanges de drogues à leur insu. » L’ONU constate que l’Europe est inondée de cocaïne malgré les saisies. Le « Guardian » de dimanche dernier citant Europol valorise ce marché « brutal et extrêmement lucratif entre 7.6 et 10.5 milliards d’euros, prix au détail ».

Des succès

Les efforts mis en place par les diverses agences de lutte et de prévention anti narcotiques nationales et internationales ne sont guère suffisantes malgré de beaux succès. Il y a de cela quelques jours la Guardia Civil en coopération avec Europol, après une enquête sophistiquée de trois ans en partenariat avec des unités européennes et non européennes, démantelait un des plus gros cartels de trafics de coke sur l’Europe. Des commanditaires, des financiers et des cadres de la multinationale du crime ont été arrêtés dans une opération policière transnationale avec des saisies de plus de  65 millions d’euros.  Ce 12 juin une nouvelle prise de 8 tonnes a été annoncée par la Guardia Civil. En mai dernier deux saisies par la marine française au large de la Martinique totalisaient 2.5. tonnes, le résultat d’une coopération multinationale anglo-américaine placée sous la coordination du MAOC (Centre Maritime d’Analyse et d’Operations / Narcotiques) de Lisbonne. Il enregistre un total de prises de 30 tonnes pour cette année-ci. Le MAOC représente une coopération de 6 pays européens avec le Royaume Uni à laquelle vient d’adhérer la RFA (mieux vaut tard que jamais) cofinancé par l’Union Européenne. Vendredi dernier les autorités allemandes ont annoncé une saisie record de 35 tonnes de cocaïne dans le port de Hambourg et l’arrestation de 9 individus. Cette quantité représente des milliards d’euros que les réseaux criminels devront à un moment ou à un autre introduire dans les circuits légaux. Sans le démantèlement de ces structures périphériques organisatrices et facilitatrices du blanchiment de ces méga montants, les efforts des agences de première ligne restent fragiles. Il s’agit de bloquer l’infiltration des montants occultes au sein des économies occidentales. Selon Europol les réseaux originaires des Balkans, aux côtés des marocains et italiens y tiennent un rôle majeur.

Les ports, un tonneau des danaïdes

Le verrouillage en cours des ports est une des mesures importantes et complexes au vu des centaines de tonnes saisies.  «Le marché européen de la drogue évolue rapidement et il est volatil, ce qui alimente la violence et la corruption. De plus, le flux des drogues illicites vers l’Europe transite en particulier par nos ports. C’est pourquoi nous avons mis en place une Alliance portuaire européenne afin de renforcer la résilience de nos pôles logistiques face aux menaces posées par la criminalité organisée. Pour lutter contre un réseau, il nous faut un réseau » commente la commissaire européenne chargée des affaires intérieures. Il s’agit de lier les 328 ports européens dans un réseau permettant d’endiguer la corruption et brutalité nécessaires à l’extraction les conteneurs frauduleux.

Le Luxembourg n’est pas oublié

Comme le constate le « Global Organized Crime Index » le marché de la cocaïne y est en progression. Le pays est un lieu de transit pour des produits passant des Pays Bas ou de Belgique vers le sud de l’Europe. Comme plateforme financière le Luxembourg jouerait un rôle dans le blanchiment des sommes provenant des trafics. Selon un rapport du gouvernement de juillet 23, la consommation cocaïne, moins léthale, serait en cours de supplanter l’héroïne. Le rapport de l’Observatoire mentionne des résidus importants de cocaïne dans les stations d’épuration de Mamer deux fois plus importants que dans celle de Boevange. Les drogues de synthèse, les zombie drugs, ces cocktails mortels bon marché et très dangereux, progressent parmi pour de jeunes consommateurs. Si le gouvernement mettait autant de moyens à disposition des personnels anti-drogue que ce qu’il dépense pour les procès -verbaux de stationnement, les risques deviendraient peut-être gérables. L’anticipation n’est pas une vertu politique des plus communes.

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