Rachel Rameau est une passionnée de restauration qui a su imposer sa vision et bâtir un restaurant à son image. Autodidacte, elle a surmonté de nombreux défis pour faire évoluer son établissement tout en restant fidèle à ses valeurs.

Rédaction : Maria Pietrangeli / Photo : Mickael Williquet

  • Nom de l’enseigne : Restaurant de Pefferkaer à Huncherange
  • Son activité : Restauratrice
  • Date de la fondation : 2006
  • Nombre de salariés : 9

Quel était votre objectif principal en ouvrant ce restaurant ?

Avant tout, nous voulions travailler ensemble, mon mari et moi, et créer un lieu qui nous ressemble. Nous souhaitions accueillir nos clients comme s’ils étaient chez eux, leur offrir un moment agréable, loin du stress et des tracas du quotidien. Ici, nous avons enfin la liberté d’insuffler notre propre philosophie de travail : créer un espace chaleureux, convivial, où chaque client se sent à l’aise, une extension de leur maison, un endroit où l’on vient se détendre et profiter pleinement du moment.

Pourquoi cette activité ?

J’ai suivi un BTS en gestion avant de venir travailler au Grand-Duché. J’ai commencé comme serveuse dans un restaurant, puis j’ai rejoint un hôtel où j’ai occupé plusieurs postes, de la réception à la comptabilité et la gestion. La seule chose que je n’avais jamais exercée professionnellement, c’était la cuisine. Pourtant, chez moi, j’ai toujours adoré cuisiner et recevoir du monde. Ouvrir un restaurant s’est donc imposé comme une évidence. Mon mari, lui, est sommelier de formation. C’est avant tout une passion commune qui nous a poussés à franchir le pas.

Comment votre cuisine a-t-elle évolué depuis l’ouverture de votre restaurant ?

En découvrant cette maison, nous avons tout de suite perçu son potentiel, idéalement située au cœur d’un village, dans un cadre correspondant à notre amour de la campagne. N’ayant pas de formation en cuisine à mes débuts, nous avons misé sur des plats traditionnels.

Au fil du temps, nous avons introduit des plats plus élaborés, qui ont rencontré un succès encore plus grand, faisant évoluer notre cuisine naturellement. J’ai eu la chance d’avoir une grand-mère passionnée de cuisine, qui m’a transmis sa curiosité et son envie d’innover. C’est avec cet état d’esprit que nous continuons à faire évoluer notre carte.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles vous avez été confrontée en tant qu’entrepreneure ?

L’un des plus grands défis au départ a été la gestion du personnel, passer du statut de collègue à celui d’employeur demandant une adaptation et un nouveau regard sur les relations de travail.

L’autre difficulté majeure était l’administratif. Malgré mon expérience, de nombreuses démarches m’étaient inconnues, et la charge administrative, en plus du travail quotidien, représentait une pression constante.

Au début, nous étions quatre : deux en salle et deux en cuisine. J’étais en cuisine dès sept heures du matin jusqu’à minuit, chaque jour. Nous habitions juste au-dessus du restaurant, et les premières années ont été entièrement consacrées à notre projet, sans compter les heures. Le démarrage a été éprouvant, mais porté par notre passion et notre engagement.

Quelle est votre plus-value par rapport à la concurrence ?

Notre principal atout, c’est notre dimension familiale. Nous sommes investis à 100 %, toujours présents, sans compter nos heures. Mon mari est là au quotidien, et notre fils nous a rejoints il y a sept ans. Pour lui, il était inconcevable de faire autre chose, ce qui nous motive encore davantage. Ce qui nous distingue, c’est cette passion partagée, ce lien familial qui se reflète dans notre restaurant et dans l’accueil que nous offrons à nos clients.

Comment avez-vous financé vos débuts, et quels conseils donneriez-vous pour lever des fonds ? Est-ce qu’une banque vous a aidée ?

Aucune banque ne nous a soutenus au départ, la restauration étant jugée trop instable. Obtenir un prêt était compliqué. Heureusement, nous avions des fonds propres et avons pu négocier un paiement échelonné avec la propriétaire de la maison inoccupée.

Nous avons un bon banquier aujourd’hui, mais seulement une fois notre activité sécurisée. Pour ceux qui se lancent, mieux vaut anticiper leur financement et envisager des alternatives aux banques traditionnelles.

Comment intégrez-vous les nouvelles technologies ou innovations dans votre activité ?

Nous utilisons les réseaux sociaux au maximum de nos capacités, même si nous ne sommes pas des spécialistes en la matière. Nous avons un compte Facebook et un compte Instagram, qui sont nos principaux outils de communication. Aujourd’hui, les réseaux sociaux nous permettent de maintenir ce lien avec nos clients, de partager nos actualités et de toucher un public plus large.

Quelle structure de networking a marché pour vous ?

L’entrée dans les guides a été un facteur clé pour nous. Dès l’ouverture, nous avons été référencés au Guide Michelin et avons obtenu un Bib Gourmand un an plus tard, renforçant notre visibilité. Nous avons ensuite intégré le Gault & Millau, avec une note passée de 13 à 14,5. Notre engagement pour les produits locaux nous a valu le label Restaurant de Terroir, et mon mari a été élu Sommelier de l’année, renforçant notre notoriété. En 2019, j’ai rejoint l’Association des Maîtres Cuisiniers de France, devenant la cinquième femme du guide, une reconnaissance d’autant plus significative en tant qu’autodidacte.

Quel conseil pouvez-vous donner à quelqu’un qui souhaiterait se lancer dans la même activité ?

Mon principal conseil serait de ne jamais se lancer dans la restauration sans une véritable passion pour ce métier. Sans elle, il est impossible de tenir sur la durée. C’est une profession exigeante qui demande un investissement total, où il ne faut pas compter ses heures. La clé de la réussite, c’est l’engagement et l’amour du travail bien fait.

Interview initialement publiée dans le Femmes Magazine numéro 265 d’avril 2025.