Money is money. Les Finlandais ont bloqué 21 navires supposés appartenir à des oligarques en attente de clarification de leurs vrais titulaires et l’énigmatique Abramovich pousse ses super yachts d’un port vers un autre. La Grande-Bretagne saisit des avions, les Italiens encore un super yacht, la France gèle 850 millions d’actifs, mais pour des raisons juridiques une saisie est compliquée, la Belgique bloque une dizaine de milliards. La banque JP Morgan vient de faire saisir un yacht russe de 75 millions de dollars à Malte. Pour l’état russe, le risque d’un défaut de paiement se rapproche avec une échéance de 2.2 milliards de dollars qui sera due le 4 avril prochain. Le département du trésor américain a précisé qu’il peut aller piocher dans des avoirs gelés jusqu’au 25 mai.
Par Cadfael
La Suisse sort de sa neutralité
L’agression par Poutine de l’Ukraine a été le franchissement d’une ligne rouge que même Berne et ses élus politiques n’ont pu tolérer. Le 19 mars dernier, le président Zelenski s’est adressé au peuple suisse de manière très émotionnelle, comme il sait le faire. Le discours a été diffusé en direct lors d’une manifestation devant le palais fédéral à Berne. Parmi les milliers de personnes, il y avait le président de la Confédération Ignazio Cassis et des diplomates ukrainiens. Zelenski a montré du doigt les entreprises suisses qui continuent leur business avec la Russie, en citant nommément Nestlé.« Il est nécessaire de geler complètement les actifs de ces gens et leurs comptes bancaires. C’est un grand combat, mais vous pouvez le faire », a lancé entre autres M. Zelenski. Il faut souligner que 80% du négoce de pétrole et de gaz russe se fait en Suisse et la holding de Nord Stream 2 se trouve à Zug. Elle vient de licencier ses 142 employés.
Les banques en porte à faux
Selon l’Association des Banques suisses, les banques du pays détiendraient 213 milliards de dollars de valeurs et auraient sur leurs comptes entre 150 et 200 milliards équivalents francs suisses, ce qui constituerait une très petite fraction de leurs avoirs transfrontaliers. Selon le porte-parole de la Banque Centrale suisse, celle-ci se serait débarrassée de tous ces avoirs russes. En représailles, Moscou a placé la Suisse sur une liste des pays non amicaux qui devront à l’avenir payer leurs achats en roubles. La banque centrale suisse a informé que les transactions commerciales relèvent essentiellement des banques commerciales.
De plus, selon une note du ministère suisse des Affaires étrangères qui a fuité, le Kremlin a fait saisir par le SFB (service de sécurité) à Moscou chez Audemars et Piguet, des montres d’une valeur de plusieurs millions de francs suisses.
L’UBS a chiffré son exposition directe au risque russe à 634 millions, et sa gestion de fortunes des avoirs russes à 200 millions détenus en collatéral pour des crédits. Crédit Suisse a informé que 4% de ses avoirs en gestion de fortune provenaient de riches clients russes, ce qui selon les calculs d’experts ferait 33 milliards d’euros sur un total gère de 827 milliards. De plus, le volume des crédits sur risque russe est de 1,7 milliard de dollars. La banque arrête ses opérations en Russie. Le Congrès US vient de lancer une enquête concernant la banque et son l’application des sanctions. La troisième plus grande banque de Suisse, Julius Baer, reste muette. Monaco saisit et sanctionne.
Membre de la zone euro, de l’espace Schengen, mais pas de l’Union européenne, Monaco a mis en œuvre et a adopté pratiquement immédiatement les sanctions économiques et le gel des avoirs imposés par l’Union européenne. Pour le micro-État cette attitude représente un tournant historique. Le rocher accueille pratiquement 749 résidents Russes et autour de 180 Ukrainiens. Selon le ministre d’État de Monaco, (qui traditionnellement est choisi parmi une liste de trois personnalités proposées par la France), interrogé par France3, la liste européenne des sanctionnés contiendrait dans un premier temps 300 noms avec « deux autres listes qui ont suivi, soit environ 500 noms ».
Combien de ceux-ci possèdent des avoirs à Monaco : “C’est une information qui doit demeurer confidentielle. Mais, dès le moment où une banque repère parmi ses clients une personne qui figure sur ces listes, elle en rend compte au gouvernement monégasque et procède au gel des fonds immédiatement.”
Et le Grand-Duché ?
Selon un communiqué du 23 mars la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF), seuls 61 des compartiments de fonds d’investissement luxembourgeois, sur quelques 15.000 domiciliés au Grand-Duché, sont « fortement exposés au marché russe », en langage clair, sont majoritairement détenus pas des entités russes
Selon les enquêtes quotidiennes, la CSSF informe que les rachats ont été gelés pour 41 de ces 61 compartiments de fonds. Toutefois, le régulateur n’a pas constaté « d’autres situations de liquidité », qui sont apparues en mars 2020. Une déclaration formulée mardi, assez peu précise, de la ministre des Finances devant la Chambre des députés informe d’un gel de 2.5 milliards d’avoirs russes, en progression, dans l’application des sanctions au Grand-Duché.
Selon delano.lu, qui se réfère à une analyse d’un groupe « stop russian capital » qui serait composé par des anciens des big fours travaillant sur base des listes de « Forbes » et du registre luxembourgeois des bénéficiaires, 12 oligarques auraient des biens et valeurs conséquentes au Luxembourg, de l’ordre de 140 milliards. Une liste se trouve sur le site de Delano.
Une question se pose : quels seraient les résultats concrets de l’application par le gouvernement luxembourgeois des sanctions européennes et internationales, si la définition de bénéficiaire effectif, qui est une personne « détient directement ou indirectement plus de 25% du capital ou des droits de vote de la société. » était moins large ?
Un vieux proverbe nous apprend que celui qui pactise avec le diable, si ce dernier ne le brule pas, il lui collera une forte odeur de soufre.