Il aura fallu deux continents, trois pays et 14 ans au cinéaste argentin Juan Antin pour voir son rêve sur grand écran.
Projeté en avant-première au cinéma Utopia le mercredi 28 novembre, avant une sortie officielle dans les salles obscures luxembourgeoises le 5 décembre, Pachamama invite petits et grands à un voyage de la Cordillère des Andes à Kuzco et interroge leur rapport avec le monde qui les entoure. Rencontre.
Quelle part du film a été réalisée au Luxembourg ?
Je pourrais expliquer assez simplement la répartition entre les studios. Doghouse Films, installé à Differdange, a travaillé essentiellement sur la partie 2D du film : une partie du storyboard, tous les layouts au trait des décors 2D, leur mise en couleur et aussi l’animation des effets spéciaux très graphiques, l’eau, le feu, par exemple. La partie 3D (réalisation des personnages et animation / compositing) a été réalisée en France et au Canada. Une partie très importante du travail du son a été réalisée au Luxembourg également, à savoir le mixage du film chez Philophon.
Sortir une version française et une version luxembourgeoise a-t-il coulé de source ?
Pour la version française, cela allait de soi… Une coproduction internationale entre trois pays francophones, la France, le Canada et le Luxembourg… Même si la version de travail du film a été réalisée en anglais, un doublage français a été réalisé à Paris.
Par ailleurs, Doghouse Films souhaitait produire une version luxembourgeoise, afin de pouvoir présenter au public luxembourgeois un long-métrage indépendant, un film d’auteur réalisé à partir d’un scénario puissant et au graphisme très fort, très loin des grosses productions internationales américaines. Le public luxembourgeois, les familles et les enfants doivent avoir la possibilité de voir des films différents, réalisés avec une vraie âme…
Le terme de « dessin animé- prend tout son sens avec Pachamama. La dimension picturale était-elle fondamentale lorsque le projet s’est esquissé ?
Effectivement, Pachamama est un film très stylisé avec une grande recherche de beauté esthétique et plastique. Pour autant, je ne parlerais pas d’une dimension « picturale » au premier sens du terme, puisque les références utilisées ne viennent pas de la peinture, mais de l’art précolombien en général. On s’est vraiment appuyé sur la poterie et l’architecture pour le design des personnages, sur les motifs que l’on trouve dans les textiles et la céramique pour travailler les décors. Ce sont des motifs simples, quasi géométriques qui, répétés donnent un aspect très puissant et originel.
C’est un film très coloré : quelle technique avez-vous utilisé pour poser les couleurs ?
Maria Hellemeyer a fait la création graphique de l’univers de Pachamama : elle nous a apporté cette palette unique et vibrante, inspirée des couleurs que l’on trouve dans la région des Andes, où le ciel est véritablement turquoise, les montagnes teintées de minéraux de toutes les couleurs et où les gens portent des tissus très bariolés.
Dans la mise en scène il y a un travail d’évolution de cette palette où, chaque séquence comporte une dominante chromatique principale, qui évolue dans un rythme tout le long du film. Pour moi, la couleur est une vibration, comme l’est la musique, et cela agit fortement sur l’émotion chez le spectateur.
Pachamama fait écho aux questions environnementales du moment. Comment aborder ensuite le sujet avec les enfants ?
C’est de façon indirecte que le film aborde ces questions, parce que j’ai avant tout voulu rendre hommage à la culture des Andes, adoratrice de pachamama. Ils considèrent cette Terre-mère nourricière comme une partie d’eux mêmes, c’est à dire, où l’être humain, les animaux, les plantes, font tous partie d’un tout uni. C’est en considérant la Terre de cette façon, et non comme un objet que l’on domine, pour en extraire des richesses, que l’on devient conscient de l’importance de son bien être pour le nôtre.
J’ai voulu adresser ce message aux enfants puisque, c’est à eux, finalement, que reviendra la tache de changer les choses.
En route pour les Oscars ?
C’est évidemment un rêve pour un réalisateur qui travaille sur un projet si longtemps et avec une vision précise de ce qu’il veut dire de pouvoir espérer être récompensé au plus haut niveau… Mais ce qui me plairait, en premier lieu, c’est qu’il y ait un vrai succès pour ce film, que les enfants et les familles en comprennent le message…
Pour la suite, nous verrons si Pachamama continuera à nous guider (sourire)…