Une bouteille sur dix consommée dans le monde correspond à la couleur rosé, d’après le dernier Observatoire Mondial du Rosé publié en 2021. Jadis pointée du doigt comme un vin de mauvais goût, la couleur a su monter en gamme pour devenir une troisième nuance à part entière, qui ne se prête pas seulement à l’heure de l’apéritif. Son image autant que son élaboration continue d’être renouvelée pour convenir aux attentes des consommateurs…

C’est l’événement de ces derniers jours : la venue de l’ex-star du rock Jon Bon Jovi en France. L’interprète de “It’s my life” n’était pas de retour pour un concert mais pour honorer un autre plaisir de la vie : le vin. Son passage dans l’hexagone consistait à officialiser la commercialisation en Europe de son vin. Un rosé que le chanteur a élaboré aux côtés d’un vigneron à succès, qui connaît bien le monde de la musique puisqu’il organise le festival international de jazz depuis 2004 dans l’un de ses domaines (au Château l’Hospitalet). Cet homme du vin, c’est Gérard Bertrand. Accompagnés du fils du chanteur, Jesse Bon Jovi, les deux hommes ont mis au point cet assemblage de grenache, cinsault et mourvèdre que les Américains dégustent depuis 2018. Le magazine de référence aux Etats-Unis, Wine Spectator, ne tarit pas d’éloges à propos de ce rosé et lui a attribué la note de 90 sur 100. Nom de code : Hampton Water, en référence à cette région au nord-est de Long Island dans l’état de New York qui constitue le refuge des stars et des grandes fortunes. 

Francis Ford Coppola, Jay Z, Carole Bouquet… Des stars qui s’offrent un château, ou mieux participent à l’élaboration de vins à la qualité applaudie (le vin sicilien de l’actrice française produit sur l’île de Pantelleria en est un parfait exemple), ce n’est pas nouveau. Désormais, les personnalités s’intéressent de près à une seule couleur bachique, et pas n’importe laquelle : celle qui est sans doute la plus critiquée. Malgré les nombreuses innovations et la montée en gamme du rayon, le rosé éprouve de sérieuses difficultés à se défaire d’une image d’un vin soi-disant bas de gamme et sans profondeur. Pourtant, il y a un point commun entre toutes les collaborations de stars avec les domaines produisant du rosé : ce sont des références de qualité.

Même les stars s’y mettent

Prenez Kylie Minogue. La chanteuse australienne vient de renouveler sa collaboration avec le château Sainte-Roseline, un cru classé de Provence dont la cuvée La Chapelle Sainte-Roseline fait taire les clichés grâce à la finesse de son assemblage et sa longueur en bouche. L’exemple phare, c’est bien sûr Brad Pitt au château Miraval, dont l’achat aux côtés de son ex-femme Angelina Jolie a fait couler beaucoup d’encre (et autant au moment du divorce). Elu meilleur vin rosé du monde par le Wine Spectator, le jus à base de grenache, syrah, cinsault et rolle est un rosé de gastronomie sur lequel on peut facilement compter pour opérer un accord au moment du repas, et pas seulement au moment de l’apéritif.

Plus que la couleur rosé, c’est le créneau du rosé provençal qui obtient les faveurs des personnalités. En 2017, George Lucas a fait l’acquisition du Château Margüi, situé à Chateauvert, qui peut aussi se féliciter d’honorer le rayon avec un rosé de gastronomie, la Bastide de Margüi, issue de sélections parcellaires. Les stars tricolores ne manquent pas non plus de saliver pour le rosé. En mars dernier, Patrick Bruel a lancé la première cuvée de son rosé Augusta, produite dans son domaine de l’Isle-sur-la-Sorgue. 

Et quand les stars ne font pas de rosé, elles choisissent des références reconnues pour présenter leur minois sur les réseaux sociaux, un verre à la main. De Beyoncé jusqu’à Kendall Jenner, les stars américaines rafraîchissent leur été avec bon goût en débouchant le rosé réussi du Château d’Esclans, Whispering Angel. Une cuvée créée en 2006 par Sacha Lichine, à l’origine d’un concept dont raffolent les Américains : le rosé premium. Quand certains pensent que le rosé n’est bon qu’à être conditionné en bag-in-box vendu à 3,50 euros pièce, l’homme d’affaires sculpte toute une gamme de vins rosés haut de gamme, dont la bouteille la plus onéreuse (Garrus), coûte 99,90 euros. A son lancement, la cuvée fut étiquetée comme le rosé le plus cher du monde. D’autres assemblages provençaux lui ont ensuite volé le titre.

Et maintenant le rosé… pétillant

Pour ce millésime 2022, ce sont les bulles qui seront les stars. Une toute nouvelle expérience gustative est proposée par la maison Chandon, une marque du groupe LVMH. Il s’agit de rafraîchir son été au moyen d’un assemblage de huit cépages, une recette qui a valeur de rareté dans le monde du rosé, qui confectionne en général ses jus en piochant parmi trois, sinon quatre, des cépages emblématiques, comme le grenache, le cinsault, la syrah ou le mourvèdre. Baptisée Le Chant des Cigales, la cuvée a été élaborée sous la direction de l’ex-chef de cave de Dom Pérignon, Richard Geoffroy. C’est donc du sérieux ! Cette création bouscule les codes puisqu’elle autorise à plonger un glaçon dans le verre. Une véritable hérésie pour les puristes, qui n’aidera évidemment pas les mauvaises langues à se taire à propos de l’intérêt gustatif du rosé… Le vin mousseux est très faiblement dosé, c’est-à-dire que le taux de sucre ne dépasse pas les trois grammes par litre. Compter 25 euros la bouteille. 

Et ce n’est pas l’unique tentative d’un rosé pétillant. Au Château Sainte-Roseline aussi, on mise cette année sur l’effervescence d’un assemblage construit autour du grenache, avec en complément cinsault, caladoc, mourvèdre et rolle. La cuvée baptisée Allégorie sera lancée le 25 mai prochain, au prix de 19 euros. Le début d’une nouvelle mode (à critiquer) ?