Céline Crespin a eu mille et une vies. Après avoir travaillé dans différents secteurs d’activité, sa passion pour la parfumerie la rattrape : elle devient alors manager de la boutique Montale, place Vendôme à Paris. Lorsqu’elle revient dans la Grande Région, faire découvrir cette maison aux Luxembourgeois devient une évidence pour elle.

Un challenge, certes, mais qui la pousse à toujours se remettre en question et à aller de l’avant. Nous avons rencontré cette cheffe d’entreprise que rien n’effraie.

S’il n’y avait qu’une seule chose à retenir de votre parcours, ce serait…

Chaotique (rires) ! J’ai véritablement mis très longtemps avant de trouver ma voie. Je suis diplômée dans les arts, j’ai fait une école de cinéma, mais entre le rêve et la réalité…Il y parfois des kilomètres. Suite à cette expérience, j’ai eu de nombreuses autres vies, j’ai travaillé dans de nombreux secteurs d’activité, tous très différents, jusqu’à devenir responsable de la boutique Montale, place Vendôme, à Paris.

Avez-vous toujours rêvé de travailler dans la parfumerie ?

La parfumerie est un milieu qui m’a toujours attirée, intriguée, mais de là à en faire mon métier : je n’y aurais jamais songé. Ma plus grande chance est d’avoir pu travailler en direct avec Pierre Montale et de l’avoir fréquemment côtoyé : j’ai énormément appris à ses côtés !

Comment arrivez-vous à vous démarquer dans un secteur aussi concurrentiel ?

Dans le secteur de la parfumerie de niche, Montale occupe une place à part. La marque a d’abord été fondée autour d’un ingrédient, le oud : Pierre Montale est un véritable prescripteur, car il a tout de suite saisi que cette matière était vouée à un bel avenir.

Devenir votre propre patron était-il un rêve ?

Pas un rêve, mais cela est devenu une évidence lorsque j’ai eu mon premier enfant. J’avais 42 ans, et cette grossesse m’a amenée à me recentrer sur moi, mes envies, mes désirs. Plusieurs raisons personnelles m’avaient conduite au Luxembourg. Je voulais continuer de travailler dans le secteur de la parfumerie de niche. Naturellement, j’ai pensé à Montale.

Ouvrir une boutique au Grand-Duché est-il plus facile qu’en France, d’où vous êtes originaire ?

Oui et non. Le point noir reste les loyers exorbitants du centre-ville. Et au regard du standing de la maison Montale, il était impensable de nous en éloigner.

Avez-vous des regrets ?

Aucun. Il y a des leçons à tirer de tout ce nous accomplissons ou que nous manquons.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat ?

Bien s’entourer. J’ai eu la chance inouïe de l’être et cela m’a facilité les choses. Que ce soit mon agent immobilier, sans qui je n’aurais jamais trouvé cet emplacement, où toutes les personnes qui m’ont accompagnée dans les démarches pour mener à bien mon projet. On n’imagine pas tout ce à quoi il faut penser.

Travailler dans un secteur très féminin n’est-ce pas parfois délicat ?

Oh si (rires) ! Dans une équipe, les femmes sont plus difficiles à encadrer. Il y a plus de tensions que dans une équipe masculine, il faut le reconnaître. Quant aux clientes : nous avons de plus en plus à faire à une clientèle très exigeante, surinformée qu’il s’agit davantage de convaincre que de conseiller. Le commerce est un secteur qui a considérablement évolué et nous devons nous adapter à tous ces changements.

Quels sont vos atouts ? 

Mon naturel et ma franchise. Cela surprend parfois, notamment dans un secteur comme celui du luxe. Mais c’est fondamental pour moi de tisser des liens avec mes clients. Je suis pour l’aisance, je n’aime pas les chichis, les faux-semblants. Je suis franche, honnête et directe. En revanche, je suis intransigeante sur la qualité du service. Le respect reste la base de notre métier.

Le management a-t-il un genre, selon vous ?

Pas un genre, mais une chose est sûre, mon avis a changé depuis que je suis devenue manager. Avant cela, il m’arriver de critiquer mes supérieurs, de penser que j’aurais fait autrement, sinon mieux, si j’avais été à leur place. Une fois de l’autre côté de la barrière, j’ai vite compris que ce n’était pas aussi facile, que tout n’était pas noir ou blanc. Manager est un exercice très délicat et fragile.

Être chef d’entreprise est-il donné à tout le monde ?

Absolument pas. Il faut avoir les épaules solides. En devenant chef d’entreprise, on acquiert une certaine liberté, mais celle-ci se paye au prix de lourds sacrifices : l’insécurité, gérer avec les aléas, les différentes casquettes. Je ne compte pas mes heures. Mon comptable me dit de lever le pied, mais je ne peux pas, je dois progresser sans cesse.

Comment parvenez-vous à jongler entre vie professionnelle et vie privée ?

C’est une question d’équilibre et celui-ci est vraiment très fragile. Si je m’écoutais, le professionnel aurait le dessus. Heureusement, mon petit garçon de deux ans me rappelle à la réalité. Il m’a appris à ralentir, à relativiser et à trouver le temps. Et surtout, je remercie les personnes qui m’ont enseigné que la qualité des moments passés ensemble était plus importante que le temps. Quand je suis maman, je le suis à 100%, il n’y a pas de place pour le reste… même si je reconnais que, comme ma boutique est encore jeune, ces instants sont rares. Je me console en me disant qu’un jour prochain, je pourrai embaucher !

Quels sont vos projets ?

Faire connaître la marque qui, si elle bénéficie d’une belle notoriété à l’international, est encore trop peu connue au Luxembourg. Venez me saluer en boutique, je me ferai un plaisir de vous faire découvrir le concept et l’univers de Pierre Montale (sourire) !