Qu’est-ce qui vous a attiré dans la spécialité de la psychologie? Et pourquoi plus spécifiquement la psychologie cognitive?
Je pense que j’étais avant tout attirée par les questions touchant le développement du jeune enfant dans des domaines tels que le langage, le traitement des informations et le raisonnement logique. Et j’étais impressionnée par la richesse de théories et de modèles existants pour étudier le développement et les apprentissages de l’enfant dans diverses situations et contextes.
Vous êtes chercheuse, pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste?
Être chercheur consiste à étudier un thème donné afin de développer des questions plus précises au sujet de ce thème. A partir de ces questions, le/la chercheur formule alors des hypothèses et choisit une méthodologie (tests, entretiens, questionnaires) pour collecter des données. Ces données sont ensuite encodées, analysées et interprétées afin d’être rédigées sous forme d’un article. Avant de pouvoir être publié, cet article sera d’abord évalué et commenté par plusieurs experts du domaine et révisé par l’auteur. Ce processus de soumission-révision-ajustement peut durer plusieurs mois, voire années parfois. Dans le meilleur des cas possibles, ce papier sera finalement publié dans une revue scientifique internationale.
Sur quel thème travaillez-vous actuellement?
Je travaille sur plusieurs sujets de recherche portant tous sur l’évaluation des apprentissages en mathématiques ou en lecture. Nous étudions, par exemple, comment on peut prédire les performances en arithmétique avec des tests de fonctions exécutives ou encore la lecture avec des tâches de dénomination rapide de symboles (chiffres, lettres…) chez les enfants de 6 à 8 ans. Ces thèmes de recherche me tiennent particulièrement à cœur parce que leur but est d’améliorer le dépistage précoce d’enfants à risque à développer des difficultés d’apprentissage. Une prise en charge sera d’autant plus efficace dans le long-terme que le repérage de ces difficultés ou du retard sera précoce.
Qu’est-ce qui vous poussé à enseigner?
De 2011-2012, j’ai travaillé en tant qu’institutrice (ma première formation) au sein d’un cycle 1. C’était une belle expérience. Je pense que j’aurais continué dans cette voie si mon ancien maître de thèse ne m’avait pas recrutée pour un nouveau projet, à la fois captivant et important. Actuellement, je travaille toujours sur ce projet qui a pour mission de développer des tests scolaires (Épreuves Standardisées) et des tests cognitifs. Quant à l’enseignement, ce trimestre je donne cours sur le développement typique et atypique des mathématiques dans le Bachelor de l’Education.
Si c’était à refaire, vous le referiez?
Oui!
Quels sont vos challenges aujourd’hui?
Mon challenge majeur consiste à développer des tests fiables pour dépister des difficultés de manière précoce. Par là, j’entends des tests inspirés de théories scientifiques permettant d’évaluer de façon valide et fidèle le potentiel de l’enfant dans un domaine précis tel que la capacité à mémoriser et à traiter des informations ou son raisonnement logique. Tout en sachant que les performances mentales et scolaires d’un enfant sont toujours aussi influencées par ses émotions, sa/ses langue/s et ses expériences vécues.
Le milieu de la recherche est assez masculin, le fait d’être une femme, est-ce un frein ou un atout selon vous?
Non, pas du tout, cela dépend beaucoup du domaine de recherche. Notre équipe de recherche (LUCET) est multidisciplinaires (managers, chercheurs, informaticiens, statisticiens, personnel administratif…) et se compose de 10 hommes et de 16 femmes. Avoir des enfants est même plutôt un atout pour mon travail.
Vous êtes également maman de deux enfants. Comment jongle-t-on au quotidien?
Tout est question d’organisation. Les enfants sont inscrits au foyer scolaire et ils ont des grands-parents à proximité, ce qui aide beaucoup, surtout lorsqu’un des deux est malade. Et parfois, j’arrive à me libérer plus tôt afin de les récupérer directement après l’école pour profiter des moments avec eux.
Quels conseils donneriez-vous aux personnes qui envisagent d’embrasser une telle carrière?
Aimer lire, calculer, et discuter. Être patient également.
Pour ceux qui s’intéressent davantage aux projets de recherches menés au Luxembourg, la 5e édition de la newsletter LEARN est apparu ce mois-ci. LEARN est l’abréviation de Learning Expertise And Research Network, en d’autres termes « expertise et réseau de recherche en matière d’apprentissage ». Nous sommes un groupe de scientifiques et de professionnels du terrain, intéressés aux processus d’apprentissage et aux difficultés liées à l’apprentissage. Notre approche de recherche se base sur les sciences cognitives. Cette newsletter est disponible sur notre blog dès mi-octobre en luxembourgeois et en français: http://learningandresearch.wordpress.com.