Voilà bientôt trois ans qu’Aline Muller occupe la fonction de directrice du Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), un poste à hautes responsabilités qu’elle a choisi d’incarner – dans tous les sens du terme – en pratiquant un management éminemment humain, solaire et positif. 

Elle s’est confiée à Femmes Magazine.

S’il n’y avait qu’une seule chose à retenir de votre parcours, ce serait…

Le fait que j’ai, tout au long de ma carrière, optés pour les chemins qui – même risqués – me laissent le plus de liberté possible pour rencontrer des personnes et construire de beaux projets qui, in fine, me permettent de me réaliser.

Avez-vous des regrets ? 

Non, si ce n’est que le temps passe bien trop vite.

Quelles difficultés avez-vous traversées dans votre carrière professionnelle et comment les avez-vous surmontées ? 

J’ai dû apprendre à gérer des situations avec des personnes dont les valeurs étaient totalement opposées aux miennes. J’avoue avoir ressenti beaucoup de mal à composer avec des personnes qui expriment des énergies négatives. Au fil du temps – et de mon expérience – j’ai appris à composer avec ces comportements sans que ma nature, profondément positive, en soit affectée. C’est sans doute ce que l’on appelle la maturité (rires).

La qualité professionnelle que vous admirez le plus ? 

J’adore interagir avec des personnes inspirées… et inspirantes !

Est-ce difficile d’occuper une fonction à haute responsabilité lorsque l’on est une femme, selon vous ? 

Je pense, surtout, ce que n’est pas plus facile lorsque l’on est un homme, même si les difficultés que l’on peut rencontrer ne sont pas  nécessairement toutes les mêmes. De par leur nature, hommes et femmes ne perçoivent pas les obstacles de la même manière. Les obstacles qui font barrage aux femmes sont sans aucun doute plus insidieux : toute une série de normes sociales – visibles et invisibles – qui ont, depuis des siècles, rendu l’accession aux hautes fonctions moins naturelles.

Le plafond de verre est donc bel et bien une réalité…

Les chiffres sont là. Donc oui, malheureusement oui…

De quelles qualités un manager doit-il faire preuve ? 

De beaucoup (rires) ! Plus sérieusement, s’il est vrai que le management nécessite une grande variété de qualités, elles doivent surtout être toutes empreintes d’énergie positive, afin que les collaborateurs soient happés par ces bonnes ondes et puissent, ainsi, s’accomplir et se réaliser. Le manager doit leur fournir la force nécessaire pour développer leurs talents. 

Quels sont les principes de management auxquels vous adhérez ? 

Je crois en la puissance d’une vision commune, d’un rêve partagé. Et, encore davantage, vraiment prendre le temps de fermer les yeux pour visualiser ce rêve ensemble. Il ne faut pas hésiter à aller jusqu’au bout et mener cet exercice jusqu’à s’imaginer avec détails l’accomplissement des projets. Je crois vraiment en la force de la visualisation et en sa faculté à faire devenir ces rêves une réalité. Et puis, c’est très dynamisant et gai d’imaginer le succès des projets sur lesquels on travaille si dur chaque jour !

En plus, cet exercice est aussi très enrichissant pour le manager : il y puise une foule d’informations sur la manière dont le rêve diffère en nuances selon la sensibilité de chacun. L’ensemble des détails apportés par chacun des collaborateurs contribue à rendre encore plus précise – et plus belle – cette vision finale !

Le management est-il différent selon qu’on est un homme ou une femme ? 

Oui, mais cela ne signifie pas qu’il est mieux ou moins bien. Il est plus intéressant de rechercher la complémentarité.

Êtes-vous pour les quotas ?

Encore une fois, je vous répondrais que je n’aime pas que l’on oppose constamment les hommes et les femmes. On parle beaucoup de chiffres, mais, finalement, on met trop peu en valeur les apports de cette mixité, la richesse qu’elle engendre, toutes les énergies positives qui émanent de cette complémentarité.

Avez-vous dû faire des sacrifices personnels pour évoluer professionnellement ?

On en fait toujours lorsque l’on rentre tard à la maison (sourire)…

Comment réussissez-vous à jongler entre vie perso et vie professionnelle ?

Grâce à l’esprit d’équipe. Et mon équipe la plus forte est sans hésiter ma petite famille.

Quel est votre meilleur atout ? 

Ma capacité à travailler beaucoup et ma forte résistance face au travail. Cela peut aussi être un danger, j’en suis consciente.

Quel est votre premier geste en arrivant au bureau ?

Je salue chacun de mes collègues, le plus souvent autour d’un café. C’est fondamental de communiquer, de sourire et de rire ! Il faut remettre l’humain au cœur de l’entreprise et prendre conscience des individus – avec toutes leurs facettes –  que sont tous nos collaborateurs. Ces petits moments sont les gourmandises de la vie qui apportent joie et bonheur.

Professionnellement, que ne supportez-vous pas que l’on vous dise ? 

Les déclarations négatives ou fatalistes et les jugements trop hâtifs.

Quel est le meilleur conseil professionnel que l’on vous ait donné ? 

Il y en a deux. Le premier n’est pas un conseil, mais une phrase ultra positive que mon boss m’a dite lorsque je lui ai annoncé ma grossesse : « tu vas voir, tu vas être encore plus forte qu’avant ! ». J’ai été bluffée. J’ai beaucoup appris à ses côtés. D’ailleurs, il m’a également enseigné de ne pas recruter des talents, mais des collègues. 

L’autre conseil est de faire attention, car le temps file à une allure vertigineuse. Nombreuses sont les personnes au crépuscule de leur carrière à me le rappeler. Aussi, il faut vivre chaque moment pleinement.