Le départ chaotique des américains et des alliés de l’Otan d’Afghanistan a laissé le champs libre aux talibans de gouverner de grandes parties du pays. Reste a savoir si les “étudiants en religion” réussiront a se maintenir ?

Selon les médias internationaux et les ONG des droits de l’homme, les femmes sont interdites de fréquenter et d’enseigner à l’université de Kaboul. Selon la BBC, d’anciennes femmes juges se cachent, car elles sont menacées de mort par des criminels qu’elles avaient mis en prison dans le passé. Le régime exécute, pend publiquement à une grue les corps de criminels exécutés. Les barbiers n’ont plus le droit de couper les barbes.

Retour en enfer

« Personne n ‘a a nous dire ce que nous devons faire. Nous allons recommencer a couper des mains, punition qui est nécessaire afin de maintenir la sécurité », informait le mollah Turabi. Ce dernier était ministre de la justice et chef de la commission de propagation de la vertu et de la prévention du vice lors du régime taliban de 1996 a 2001. Désormais, il est en charge du système carcéral. On lui doit une répression brutale avec des exécution publiques dans les stades de Kaboul. Ce Pashtun, né en 1958 semble avoir été l’un de ceux qui ont ordonnée en 2001 la destruction des bouddhas vieux de 1500 ans. Il est, avec d’autres membres du gouvernement, sur la liste des personnes sanctionnées par l’ONU. C’est de cette époque qu’en matière de culture du pavot « la consommation en est interdite, la production et le commerce ne le sont pas. »

Les revenus du pavot

Initialement ce n’était pas le drogue qui finançait le mouvement. En 1994, lors de l’apparition du mouvement taliban dans la province de Kandahar il était financé par le Pakistan et l’Arabie saoudite ainsi que par la perception d’une taxe de 10 % sur le trafic de marchandises entre le Pakistan et l’Afghanistan. En 1997, cela rapportait 75 millions de dollars de taxes ce qui a servi à financer avec le soutien des services de renseignement pakistanais, la création d’une troupe de 25.000 hommes dotés de blindés, d’hélicoptères et d’une aviation légère. Cela permettait également l’achat ou la corruption de groupes d’opposants, chefs tribaux, mafieux, gangs et seigneurs de guerre, aujourd’hui encore élément essentiel de la stratégie talibane, qui élimine ou attire de son coté.


À ces revenus se rajoutent 10 % issus de la gestion de la culture du pavot également perçus sur les trafiquants et les laboratoires de transformation vers l’héroïne et les méthamphétamines. En 1990, ces taxes étaient relevées à 20%. Les talibans donnent même des conseils de production, distribuent des engrais et possèdent des fermes pilote. La production qui était de 1500 tonnes en 1996 est passée a 4600 tonnes d’opium en 1999.


En 2020, les revenus de la drogue, produits bruts et transformés, auraient rapporté 416 millions malgré des prix en baisse selon UNODC (United Nations Office on Drug and Crime) et un reportage de « Radio Free Europe » de septembre 2020 qui se base sur des sources de l’Otan. À ceux-ci, il convient de rajouter les taxes sur les transporteurs sous contrat de l’Otan et sur des trafiquants de toutes sortes, de même que sur l’exploitation minière illégale. Avec les donations de l’étranger plus particulièrement du Pakistan et du Proche Orient les revenus des talibans en 2020 sont estimés a 1.6 milliards de dollars.

Des politiques d’éradications contre productives

Selon un rapport d’UNODC d’avril 2021, la culture du pavot occupait 224.000 hectares et aurait produit entre 5400 et 7200 tonnes d’opium en 2020. Même si des 20 dernières années on assistait a des réductions temporaires de surfaces, la culture du pavot n’a fait qu’augmenter. Une interdiction de la culture était, et est, porteuse de déstabilisation des fragiles équilibres sociaux. Autour des lieux de trafic et de culture des microéconomies éclosent et permettent une sortie de la misère. Malgré des périodes de prohibition relative autant sous les talibans qu’à partir du début des années 2000 sous la gestion militaire américaine celles-ci s’avéreront contre-productives. Les paysans ne livrent plus d’informations et deviennent de fait alliés des talibans qui les subventionnent. Les seigneurs de la guerre changent d’allégeance au grès des flux financiers, et monnaient leur soutien militaire car ils sont eux-mêmes impliqués dans le trafic.

Les diverses tentatives d’éradication n’ont pas affaibli ni la base financière des talibans ni leur support dans certaines couches de la population selon une analyses de la London School of Economics d’avril 2019. Au contraire, l’économie du pavot est devenue intégrée, contrôlée par des seigneurs de la guerre reconvertis en talibans. Le pavot est l’épine dorsale d’une stabilité politique dans un pays aux 14 ethnies et de nombreuses tribus ayant des coutumes et pratiques religieuses non nécessairement convergentes.

Une nouvelle donne

Pendant la phase active du conflit les talibans, malgré leur différences ethniques, tribales, nationales ou d’interprétation de la loi coranique, ont su resté unis, ce qui va être beaucoup plus difficile maintenant où il faudra gérer un pays et se faire accepter sur la plan international. Les diverses composantes ont des visions hautement divergentes sur de nombreux sujets dont celui de l’internationalisation du djihad . Actuellement, la production d’héroïne et de méthamphétamines cherche sa voie sur les marchés voisins. Elle est en concurrence avec des producteurs d’Amérique latine, du Myanmar et vise les marchés africains et moyen orientaux. Le 15 septembre les autorités indiennes saisissaient 3 tonnes d’héroïne afghane d’une valeur à la revente estimée a 2.7 milliards de dollars

Les relations économiques avec la Chine , l’Iran, l’Asie centrale et Pakistan constituent une base qu’il faut maintenir. Les politiques de contre-terrorisme de l’Iran, la Russie et la Chine s’accommodent mal avec, à leur portes, des talibans trafiquants de drogue et marchands de terrorismes. La non-dissémination d’un islam radical demeure un défi mondial.